Aimons-nous les uns les autres
par Pierre-Marie Bourdaud.
Aux JO de Sydney, l’Australie nous chante sur tous les tons sa réconciliation avec ses aborigènes(1). Bravo, on veut bien. Mais il est amusant de constater que quelques images suffisent à jeter le doute :
– . cérémonie d’ouverture. Touchante d’harmonie, paraît-il. Et quel tableau voit-on ? (Le Monde, Ouest-France Dimanche) : une gentille petite fille blanche poursuivie par de vilains aborigènes aussi bleus et gluants que des noyés de huit jours !
– . Photo dans Libé. Juan-Antonio Samaranch, tout puissant patron du CIO , ex-dignitaire franquiste, pose parmi des aborigènes en peintures rituelles. Mais il suffit de regarder de plus près leurs visages pour découvrir qu’ils sont aborigènes comme moi pape !
– . A la télévision. Cathy Freeman court le 200 m. Pour l’aérodynamisme, elle est en combinaison totale, on ne voit pas de peau ni de cheveux. Quel symbole : on veut bien des « abos », mais masqués.
Pour le général Custer, du temps de la Guerre de sécession aux Etats-Unis, un bon Indien était un Indien mort. Pour les Australiens, un bon Aborigène est un Aborigène assimilé, aligné sur les valeurs du monde occidental : la vitesse avant tout, la réussite individuelle, l’être au détriment du paraître, et des jeux pour remplacer le pain.
Car, pendant ce temps-là , comment vit au quotidien ce peuple, quels sont ses droits à l’identité, quelles excuses officielles lui a présenté l’Etat australien de toutes les horreurs qu’on lui a infligées : pour ça, tu peux toujours courir, Cathy !
PS - Et n’oublions pas le sort que la France a réservé à ses propres indigènes
NDLR : la victoire de Cathy Freeman est très symbolique puisque la championne revendique ses origines aborigènes. Preuve en est le tour d’honneur qu’elle a accompli en tenant d’une main, le drapeau australien et, de l’autre, une bannière aux couleurs de la communauté aborigène.
Les aborigènes, en dépit d’une présence remontant à plus de 40 000 ans, ont été victimes d’une extermination au moment de l’arrivée des premiers européens en Australie.
Plus exactement des forçats anglais.
Un passé dramatique qui hante toujours l’Australie
et qui a refait brutalement surface avec les jeux olympiques de Sydney en septembre 2000