Ecrit le 9 janvier 2013
Pavée de vanité
Il était riche, très riche même. Il avait peu d’amis, pas d’amis même. Sa fortune lui avait permis d’acquérir une forêt. Pas n’importe quelle forêt. La Forêt Pavée, 680 hectares, 6 kilomètres d’est en ouest, traversée (hélas disait-il) par 3 routes départementales et une voie ferrée. Un étang, un château, des bâtiments de service et une maison de garde complétaient le tableau.
C’est dans ce décor qu’il put recevoir, à tour de rôle, les officiers allemands jusqu’en 44, puis les officiers américains ensuite. Sa forêt lui tenait lieu de famille, tant et si bien qu’Ã sa mort il en fit don à la fille de son ancien garde-chasse. Cadeau empoisonné d’ailleurs, mais c’est une autre histoire.
Il avait fait réaliser, de son vivant, son monument funéraire au cimetière d’Issé, l’une des quatre communes sur lesquelles s’étend la forêt. réaliste et convaincu de ne pas atteindre l’an 2000, il avait demandé au graveur, de n’inscrire après son année de naissance que le chiffre 19. Dans les jours qui suivirent son décès, fin mai 1950, il fut ajouté le millésime.
Ce monument était très beau, très haut et très coûteux. Du granit breton, de la pierre de Lanhélin sans défaut. Les taches que l’on voit aujourd’hui c’est de la mousse qui a réussi à se fixer sur le granit poli non entretenu.
Il souhaitait que sa mémoire perdure et avait acheté une concession à perpétuité. Voilà qu’aujourd’hui pour des raisons démographiques et foncières, les municipalités envisagent de reprendre les emplacements sans entretien, sans visiteurs. Et que cet homme qui voulait durer, continuer à être le riche, le puissant du coin par mausolée interposé, va se retrouver à l’ossuaire tandis que les pierres chèrement acquises serviront de remblai. Comme tout « honnête homme » il devait posséder une bible mais avait négligé de lire l’Ecclésiaste.
(texte et photo : Alain Borgone)
Toutes choses ont leur saison,et toutes délibérations sous le ciel ont leur temps.Temps de naître, et temps de mourir.Temps de planter, et temps d’arracher ce qui est planté.Temps de tuer, et temps de guérir.Temps de détruire, et temps d’édifier.Temps de pleurer, et temps de rire.Temps de lamenter, et temps de sauter.Temps de jeter pierres, et temps de les recueillir.Temps d’embrasser,et temps de s’éloigner des embrassements.Temps de chercher, et temps de perdre.Temps de garder, et temps de rejeter.Temps de déchirer, et temps de coudre.Temps de se taire, et temps de parler.Temps d’aimer, et temps de haïr.Temps de guerre, et temps de paix (L’Ecclésiaste)
Vanité des vanités, dit l’Ecclésiaste, tout est vanité. Quel avantage revient-il à l’homme de toute la peine qu’il se donne sous le soleil ? Une génération s’en va, une autre vient, et la terre subsiste toujours. Le soleil se lève, le soleil se couche ; il soupire après le lieu d’où il se lève de nouveau. Le vent se dirige vers le midi, tourne vers le nord ; puis il tourne encore, et reprend les mêmes circuits. Tous les fleuves vont à la mer, et la mer n’est point remplie ; ils continuent à aller vers le lieu où ils se dirigent. Toutes choses sont en travail au delà de ce qu’on peut dire ; l’oeil ne se rassasie pas de voir, et l’oreille ne se lasse pas d’entendre.
Ce qui a été, c’est ce qui sera, et ce qui s’est fait, c’est ce qui se fera, il n’y a rien de nouveau sous le soleil....
Ecrit le 16 janvier 2013
A Châteaubriant,au COEUR du quartier Pont Saint Jean,ce graffiti,TREFLE et CARREAU,PIQUE ma curiosité.
Texte et photo : Alain Borgone