Ecrit le 22 mai 2013
Les sondages, c’est comme les diseuses de bonne aventure : on ne croit que ce qu’on est prêt à croire !
« Quand ils sont trop bons, les sondages, on est tous complètement endormis, quand ils sont mauvais, ça déprime. Donc, ne les regardons pas. c’est juste une intuition : c’est Nicolas Sarkozy qui va être élu » . disait Jean-François Copé le 4 mars 2012, tandis que François Fillon se consolait : « Les sondages sont une chose, le peuple qui a pris la Bastille en est une autre » (2 mars 2012)
En ce moment, pour s’occuper, la grande presse publie des sondages à répétition et des politologues (que l’on aurait espéré plus sérieux), les commentent à qui mieux mieux. Voici à ce sujet une réflexion d’Alain Garrigou, (extraits), empruntée au Blog du Monde Diplomatique (les intertitres sont de la rédaction de la Mée)
Alimenter les doutes
Les médias ne cessent d’analyser les records d’impopularité des dirigeants. François Hollande élu depuis un an en établit d’ailleurs un nouveau (). Cette fois, les mauvais chiffres ont amené à remettre en cause l’autorité politique issue de l’élection. Dans les manifestations hostiles au mariage pour tous, on a entendu des cris de « Hollande démission », se référant aux sondages. De bonne guerre ? En tout cas nouveau. Comme l’évocation par des journalistes politiques de leurs doutes sur la capacité à gouverner, lancés sur la foi des mauvais sondages.
Mettre en question la légitimité politique un an après une élection peut laisser perplexe. Les commentateurs ne manquent d’ailleurs pas de jugement en évoquant les effets des sondages, capables à force de répétition et de gloses, de saper l’autorité des dirigeants. ()
Refaire les élections
Dans un système politique tel que celui de la IVe République, les sondages auraient déjà entraîné une valse des gouvernements. Le simple fait que des doutes sur la légitimité du pouvoir se nourrissent de sondages si proches de l’élection présidentielle suffit à mettre ces sondages en concurrence avec l’élection elle-même.
Or, il y a de plus en plus de mesures d’opinion. Aux vieux baromètres mensuels, sont venus s’ajouter d’autres types de sondages qui simulent des élections présidentielles un an à peine après les dernières ! Ces simulations, à l’apparence de sondages sur les intentions de vote, font exister des intentions de vote rétrospectives puisqu’on y met les protagonistes réels de l’action précédente. Ces fausses élections rétrospectives ne refont pas l’histoire mais permettent de douter de la légitimité de l’élection chaque fois que les résultats sont très différents, en laissant supposer que beaucoup d’électeurs se sont trompés ou regrettent leur choix. Et significativement, ce ne serait pas les sondés d’aujourd’hui qui se tromperaient, mais les électeurs d’hier.
(...) Les sondages concurrencent donc l’élection au moment même où leur qualité s’est fortement dégradée. Il ne semble pas que les commentateurs s’en émeuvent. Ni les sondés rémunérés pour leurs avis. Dorénavant, l’opinion publique rémunérée est un contrepoids à l’opinion publique « gratuite » du suffrage universel.
Une opinion furtive et payante
Les sondages sont en train de modifier les règles du jeu démocratique, non seulement en affectant la légitimité des gouvernants élus, mais en chamboulant le temps de l’action politique, en déterminant ses objectifs. Nul besoin d’un changement constitutionnel. Il suffit de produire une opinion furtive et payante, par le biais d’entreprises privées, sur un marché autorégulé : une opinion publique atomisée et rémunérée par l’argent d’agents intéressés à sa production.
Cette situation nouvelle sert les intérêts des sondeurs qui, de commentaires en commentaires, aussi futiles soient-ils, occupent les plateaux et les colonnes, alimentant ainsi leur narcissisme.
Peut-être y voit-on déjà le symptôme d’un journalisme indigent en temps de crise : le commentaire de ceux qui n’ont plus rien à dire.
On n’oubliera pas que les sondages ont apporté une ressource nouvelle aux journalistes qui peuvent s’ériger en interprètes de l’opinion publique face aux dirigeants politiques. Aucun statisticien ou sociologue n’accordant pourtant beaucoup de crédits aux sondages publiés chaque jour, il est significatif que toute une profession ne les entende pas et préfère écouter les sondeurs, donc les marchands.
Croyez-vous aux sondages ? « A la question : faites-vous encore confiance aux instituts de sondage ? 64% des Français répondent non. Et 59% répondent oui. » de Philippe Geluck. Extrait de la bande dessinée Le Chat à Malibu .
Tests de légitimité
LÃ encore le désir de puissance par lequel les plus puissants des journalistes donnent des leçons de politique ou prodiguent bons et mauvais points, fait regretter qu’ils ne soient pas aux commandes. Quant aux responsables politiques, il semble qu’ils aient tout à craindre de cette élévation des sondages au rang de tests permanents de leur légitimité propre.
Le savent-ils ? Apparemment pas tous. Le 6 mai 2013, à l’occasion d’une émission de France 2 dressant un bilan de la présidence de François Hollande, le sénateur socialiste André Vallini a dû expliquer la volte-face du gouvernement sur la question de l’amnistie aux syndicalistes, amnistie que le sénateur socialiste avait lui-même votée dans la haute assemblée. Comment allait-il expliquer une telle incohérence ? André Vallini évoqua d’abord les manifestants violents hostiles au « mariage pour tous » et le besoin selon lui de ne pas encourager ce type de comportement. Dès lors que cette seule justification ne suffirait pas « ” car faire payer à des militants syndicalistes le comportement de militants de droite et d’extrême droite n’est pas d’une logique absolue »”, André Vallini ajouta : « Et puis, les sondages sont là : 70 % des Français sont contre l’amnistie ! »
Un parlementaire qui accepte que son propre vote pèse moins qu’un résultat concocté par une entreprise de sondages, c’est nouveau. Est-ce vraiment prometteur ?
Extraits de l’article de A.Garrigou
Sondages par internet : rémunération
Ce sont des sondages rémunérés, dit Alain Garrigou dans son article « Le sondage de trop » où il explique que : « les internautes sont invités à gagner des cadeaux ou des primes, dont la valeur totale est suffisamment attractive mais qui, divisée entre les gagnants, donne des gains faibles à chacun. Les sondeurs sont pris ici dans une situation de double contrainte : soit la rémunération est élevée et on les accuse de payer l’opinion ; soit elle est faible et ils ont du mal à trouver des sondés ».
« La rémunération a un rendement décroissant : si les internautes étaient plus rémunérés, cela accroîtrait les coûts, mettrait en cause la légitimité d’une rétribution de l’opinion et enfin produirait des sondés professionnels ».
Un dernier sondage paru dans Nice-matin du 20 mai 2013
Les Français ne sont que 26% à estimer qu’il « propose de bonnes solutions aux problèmes du pays », 25% qu’il « a des dirigeants de qualité », 24% qu’il « propose des idées nouvelles » et 23% qu’il « est à l’écoute des Français ».
De qui s’agit-il ? De Fr.Hollande ? Du gouvernement ? Du Parti Socialiste ?..
Bé non !Ce sondage concerne l’UMP !! Comme quoi en France l’impopularité est partagée si l’on croit les sondages ! !!!!