Ecrit le 18 juin 2014
Faut le garder jalousement
Farzana Parveen : vous connaissez ? Elle avait 25 ans et avait épousé Mohammad Iqbal contre la volonté de sa famille. Elle se rendait au tribunal de Lahore, au Pakistan, pour dire qu’elle avait fait un mariage d’amour. (Les mariages arrangés sont de tradition chez les Pakistanais conservateurs pour qui le mariage d’amour est une transgression).
Sur les marches du Palais de Justice, devant une foule considérable, la famille de Farzana a tenté de la séparer de son époux, mais elle a résisté. C’est alors qu’elle a été battue, à mort, à coups de bâtons et de briques de chantier. Elle était enceinte de trois mois. C’est ce qu’on appelle ’’un crime d’honneur’’. Le crime de trop, espérons-le. Des centaines de femmes sont tuées chaque année au Pakistan, par des maris ou des parents, en tant que punition pour adultère présumé ou d’autres comportements sexuels illicites
En 2002, une femme au Pakistan a victime d’un viol collectif, sur l’ordre d’un conseil de village, pour laver une ’’faute’’ commise par son jeune frère de 12 ans. Six hommes ont été ensuite condamnés à mort pour son viol, dans une décision de justice qui avait fait grand bruit. Mais cinq ont été acquittés ultérieurement, et le principal accusé a vu sa condamnation commuée en prison à vie.
En janvier 2014, une jeune fille a été victime d’un viol en réunion pour avoir eu une relation amoureuse avec un jeune d’une autre communauté villageoise et pour n’avoir pu payer l’amende imposée par le conseil de village.
Fin mai 2014, deux adolescentes indiennes de 14 et 15 ans, de basse cas- te, ont été violées par plusieurs hommes, et pendues. Face à l’émoi suscité par l’affaire, des habitants des environs ont apporté leur propre témoignage : les victimes sont de basse caste, des intouchables souvent, et les accusés de plus haute caste, des Yadav, généralement. Ces derniers possèdent en effet les terres, contrôlent les emplois dans l’administration et dans la police, jusqu’au poste de ministre en chef de toute la région. Ces crimes servent de moyen de pression sur les basses castes pour éviter leur émancipation. Et ils sont rarement réprimés ; les victimes ont trop peur, les accusés trop d’influence. Fin mai, toujours, une adolescente ’’intouchable’’ de 17 ans a été violée. Sa mère a osé porter plainte. Mais les membres de la famille des accusés l’ont déshabillée et l’ont battue pour la forcer à retirer sa plainte.
« Le viol est un crime social qui dépend des hommes et des femmes. Parfois, c’est légitime, parfois, c’est injuste. » La récente déclaration du député indien Babulal Gaur suscite une vague d’indignation internatio- nale, assortie de rappels nécessaires sur les chiffres des agressions sexuelles en vertigineuse croissance en Inde.
Chez nous, c’est mieux
Ah ces étrangers ! Quel manque de civilisation ! En Occident, nous avons heureusement évolué ... quoique ... faut-il rappeler les propos du citoyen américain Todd Akin qui parlait en août 2012 de « legitimate rape » pour distinguer les « vrais » viols des « faux » et illustrer sa conviction qu’il est impossible de tomber enceinte à l’issue d’une agression sexuelle ! Il voulait expliquer, de cette façon, son hostilité à l’IVG, même en vas de viol.
En France, faut-il rappeler la ligne de défense des policiers soupçonnés d’avoir violé une touriste canadienne en avril dernier dans les locaux de la PJ à Paris et qui visait principalement à déterminer si la victime avait été ou non suffisamment « avenante » pour induire en erreur ceux qui furent tentés de requalifier en « relation sexuelle » le viol dont on les accusait ?
La femme ? Un bijou mais sans doute pas un être humain.