Ecrit le 24 juin 2020
Le mot AMI, après avoir été écrit d’abord amic, amicz et amics, est issu du latin amicus, amica (amant, maîtresse) qui viennent du verbe amare (aimer).
En français, il s’articule sémantiquement avec amitié et non avec amour, comme ce pouvait être le cas en latin ainsi qu’en ancien français pour amicus par rapport à amor. Ami a en effet signifié amant jusqu’au XVIIe siècle dans la locution ami par amour qui se disait à propos de l’amant d’une femme mariée. Ami de cœur qui signifiait ami préféré a aussi le sens d’amant jusqu’au XVIIIe siècle ; il est resté en usage avec une modification de valeur pour ami.
Un autre sens est parent : ami de char (= chair) et ami de ligne (= de lignage), emplois qui ont disparu avant l’époque classique.
La valeur ancienne, érotique et amoureuse, reste active en français moderne, surtout au féminin (son amie) et dans des expressions formées avec des adjectifs : bon, bonne, petit, petite. Le féminin amie comporte les deux valeurs, amitié et amour au XIe siècle, ce qui fait que les sens extensifs de maîtresse ou compagne dès le XVe siècle ont donné à cette acception amoureuse plus de d’importance et de durée. Belle amie est un des termes importants du vocabulaire courtois, où avoir belle amie signifiait avoir une maîtresse. Bonne amie est resté dans l’usage : usuel en ancien français, il devient archaïque et « provincial » puis est repris dans l’usage familier, souvent ironique. Ami, avec un possessif s’emploie au XXe siècle par euphémisme pour amant (c’est son ami).
Le français moderne a développé des valeurs affaiblies de ce mot où ni l’amour, ni l’amitié ne sont en cause : le mot s’employait depuis longtemps pour désigner des personnes liées par l’intérêt, de là des expressions comme pour compte d’ami.
Ami était employé dès l’ancien français dans ce genre de valeur faible comme terme d’adresse à un inférieur :Eh, l’ami, mon ami, et plus tard mon petit ami (employé par Molière dans Le Malade imaginaire : Là , là , mon petit ami, apaisez- vous un peu, dit Béline à Argan à l’acte I) est devenu condescendant, voire méprisant.
Les expression ami d’enfance, de collège, de lycée équivalent à peu près à camarade. Dans l’expression chambre d’ami , il ne signifie plus que hôte.
Le mot a une valeur positive dans les expressions encore très vivantes aujour-d’hui comme les bons comptes font les bons amis ou les amis de nos amis sont nos amis.
Au figuré, ami de correspond à qui aime : amis de la bouteille, les amis de l’homme (les animaux familiers).
Ami s’emploie aussi comme adjectif au propre et au figuré dans l’expression un destin ami (propice) ou Châteaubriant, Ville amie des enfants.
Avec le possessif mon, ma, élidé, amie a fourni M’amie, terme d’affection sorti d’usage mais encore connu alors que le masculin m’ami est demeuré régional. L’emploi récent de mamie pour grand-mère est un anglicisme (mammy) qui tend à remplacer bonne maman et grand- maman et qui n’a pas de rapport avec amie.
Enfin, le mot ami figure dans le titre de nombreuses œuvres littéraires : ainsi Plutarque écrit en 49 après J.C. De l’inconvénient d’avoir trop d’amis ; Anatole France, Le livre de mon ami en 1885 et Maupassant, Bel ami en 1885 également. Fred Uhlman écrit l’ami retrouvé en 1971. Et la 11e fable du second recueil des fables de La Fontaine publié en 1678, s’intitule Les deux amis ; elle est inspirée par une fable de Pilpay, un sage indien, dont le titre est De deux amis. On peut y lire :
« qu’un ami véritable est une douce chose ! »
DEVINETTE : pourquoi le mot amadou est-il de la même famille qu’ami ?
REPONSe à la dernière DEVINETTE : anticonstitutionnellement est comme chacun sait le mot le plus long de la langue française.
Elisabeth Catala