Ecrit le 3 juin 2020
Le contexte de « déconfinement progressif » est encore très incertain et dépend beaucoup de paramètres que personne ne maîtrise, comme la mise au point d’un vaccin ou la découverte de traitements efficaces contre le Covid-19. Mais c’est précisément dans les périodes de choc d’immédiat après-crise que l’histoire s’accélère. Depuis plusieurs mois, une vingtaine d’organisations syndicales et associatives convergent, convaincues que les réponses aux urgences sociales et écologiques doivent être construites ensemble. La crise qui a éclaté en ce début d’année 2020 montre une fois de plus la nécessité de changer de système.
Un plan de sortie de crise vient d’être présenté. Il ne s’agit pas d’un plan figé, ficelé et définitif. Au contraire, ces propositions ont vocation à être soumises au débat public. L’heure est aux urgences sanitaires et sociales et à la satisfaction des besoins essentiels de la population, dans le respect des droits démocratiques. En particulier doit être lancé un vaste plan de renforcement et de développement des services publics.
Au mois de juin, sera présentée une nouvelle loi de finance rectificative : si l’on veut que cette crise ne soit pas l’occasion de plans d’austérité et de nouvelles régressions sociales, si l’on souhaite partager les richesses et financer la transition écologique, alors il faut refonder le système bancaire et financier et la fiscalité.
Ce plan se présente en quatre parties .
1. les conditions pour un déconfinement assurant la sécurité sanitaire, la démocratie et les droits fondamentaux
Objectif 1 : Garantir à toutes et tous les mesures de protection et de prévention
1. La gratuité des masques et l’accès aux tests pour toutes et tous,
2. Un plan d’urgence pour l’hôpital public,
3. Un plan contre les violences faites aux femmes,
4. Garantir la sécurité au travail.
Objectif 2 : Assurer la sécurité sanitaire en renforçant les droits démocratiques et individuels
1. La levée de l’État d’urgence sanitaire,
2. Le renforcement des droits des travailleuses et des travailleurs,
3. Pour les droits des femmes et contre le sexisme,
4. Pour les droits des étrangers et personnes incarcérées.
2. répondre à la crise sociale, ici et ailleurs
Objectif 3 : Du travail pour tous
1. Hausse des salaires,
2. Le maintien des droits pour les intermittents, l’indemnisation des chômeurs,
3. La réduction et le partage du temps de travail,
4. L’interdiction des licenciements dans les entreprises qui font du profit,
5. La revalorisation immédiate des salaires et des carrières des femmes.
Objectif 4 : Garantir la satisfaction des besoins essentiels.
1. la création d’emplois dans l’agriculture,
2. un droit garanti au revenu et à la protection sociale pour tous.
3. l’accès à une alimentation de qualité pour tous
4. l’accès et le droit au logement de qualité pour tous.
Objectif 5 : Pour une réelle solidarité internationale
1. Engager des annulations de dettes des pays les plus pauvres,
2. Pour un fonds d’aides internationales,
3. La mutualisation des savoirs et des brevets pour garantir l’accès mondial à l’innovation et la coopération sur les biens médicaux,
4. Pour la souveraineté alimentaire pour tous les peuples.
3. l’argent magique : aller le chercher au bon endroit
Objectif 6 : Reprendre le contrôle sur le monde de la finance et la dette publique :
1. Pour une politique monétaire et prudentielle au service des besoins sociaux et environnementaux,
2. réguler les activités bancaires.
Objectif 7 : Plus de justice fiscale
1. Pour une imposition plus juste et progressive des revenus et du patrimoine,
2. Lutter efficacement contre la fraude et l’évasion fiscale,
3. Renforcer la taxation des transactions financières,
4. Supprimer les niches fiscales inutiles et les exonérations nocives pour le climat, la biodiversité et la lutte contre les inégalités.
4. Pour une reconversion écologique et sociale des activités
Objectif 8 : Accompagner durablement la reconversion
1. Une loi pour soumettre les entreprises à l’accord de Paris et interdire les dividendes climaticides.
2. l’arrêt des soutiens publics aux acteurs polluants,
3. Accompagner la reconversion via des systèmes de formation et d’enseignement-recherche rénovés.
Objectif 9 : Transformer nos modes de production, de mobilités et de consommation,
1. Stopper toutes les négociations et finalisations d’accords de commerce et d’investissement,
2. Repenser les mobilités,
3. Une loi pour bâtir une économie de sobriété,
4. Un plan de transition sociale et écologique de l’agriculture et de l’alimentation.
« qu’autant d’organisations, avec des cultures et des histoires politiques aussi différentes, parviennent à se mettre d’accord et acceptent de porter publiquement, ensemble, des mesures fortes et structurantes, ce n’est pas rien. Cela représente un front très large, avec une forte légitimité », analyse Aurélie Trouvé, porte-parole d’Attac. « Dans l’histoire des mouvements sociaux, c’est même plutôt inédit ». On peut même dire que cela rappelle le projet « Les jours heureux » mis en place par le Conseil National de la Résistance au sortir de la seconde Guerre Mondiale.
A lire ici : voir le site plan-de-sortie-de-crise
La santé est plus que jamais une priorité absolue. La pandémie a démontré que le système de santé doit échapper à une gestion privée. Il est urgent de réinventer un système public de santé, d’action sociale et de sécurité sociale pour satisfaire les besoins de la population. Le plan propose en ce sens des mesures d’urgence. Combattre les discriminations jusqu’au cœur des institutions est absolument indispensable.
Si l’hôpital a tenu, malgré les plans d’austérité imposés depuis de nombreuses années, c’est bien du fait de la mobilisation des personnels. Ce ne sont pas les ’premiers de cordée’, bénéficiaires des politiques néolibérales, qui ont permis à notre société de tenir, mais bien le travail de salariés et de fonctionnaires d’ordinaire peu considérés, peu valorisés, au statut parfois précaire. L’utilité sociale des activités nécessaires au bon fonctionnement de la société ces dernières semaines doit être reconnue. La crise doit conduire l’État, les branches professionnelles et les entreprises, à prendre de nouveaux engagements pour revaloriser tous ces emplois à prédominance féminine.
Dans ce contexte, la question de l’information est décisive. Elle doit éclairer le débat et les choix à opérer. Ceci impose de faire reculer l’emprise du pouvoir politique sur le secteur public de l’information et la domination du secteur privé de l’information par une poignée de milliardaires. Parce qu’il n’y aura pas de résolution à la crise d’aujourd’hui avec les solutions d’hier ou le repli sur soi, ce travail collectif se poursuit ...