Ecrit en 2000
Le Pays de l’assassinat légal
Jeudi 2 mars 2000 à 18 heures 25, un jeune noir de 31 ans, ODELL BARNES, a été le 617e prisonnier de droit commun assassiné par les autorités américaines depuis 24 ans et le 19e depuis le début de l’année 2000. Le responsable de ce meurtre, donc le meurtrier, est un certain Georges BUSH, Gouverneur du Texas et fils d’un ancien président des Etats-Unis, et lui même candidat républicain (c’est-Ã -dire conservateur) aux prochaines Elections présidentielles. Ce Georges BUSH a déjà sur la conscience 121 meurtres dont quelques jours auparavant celui d’une femme de 61 ans. (Dans ce pays, jusqu’Ã ce jour, 85 condamnés ... exécutés ... ont été reconnus innocents)
Une autre exécution se prépare au Texas, celle d’un noir américain de 32 ans, Farley C.Matchett condamné à mort en situation de légitime défense en se défendant contre un Blanc qui le menaçait d’un couteau.
Bulletins de vote sanglants
Il y a aussi de sérieuses présomptions d’innocence concernant le crime dont est accusé Odell BARNES et l’opinion publique internationale est massivement intervenue en sa faveur (appels de CHIRAC, de JOSPIN, du Pape, etc ). Georges BUSH n’a rien voulu savoir. Il faut dire que la majorité des habitants de ce pays aux moeurs sauvages, que certains nous présentent comme un modèle de civilisation et de liberté, ne connaît que la loi du talion (pour un oeil, les deux yeux ; pour une dent toute la gueule ). La majorité des citoyens et des citoyennes d’Amérique ressent une véritable jouissance physique, il suffit de voir leurs faces haineuses lorsqu’ils sont interviewés à la téloche, après une exécution. On a connu en France des individus, mâles et femelles, de cette espèce et il en existe encore. Alors, comprenez BUSH, quand il y a une élection ... !
ll n’y a que moins de 20 ans que la peine de mort fut abolie en France à l’initiative de François MITTERRAND, président de la République, qui n’a pas hésité de prendre le risque de marcher à contre-courant (Il est en effet peu probable que l’abolition de la peine de mort l’eût emporté s’il y avait eu un referendum à ce sujet). Et rien qu’Ã ce titre le nom de François MITTERRAND mérite de rester dans l’Histoire .
Bleu, Blanc, et ROUGE !
Il y a 24 ans le 28 juillet 1976 à 4 heures 13, à la prison des Baumettes à Marseille, un jeune homme de 22 ans, Christian RANUCCI, eut la tête tranchée par la guillotine, le président de la République, Valéry GISCARD D’ESTAING, ayant refusé de gracier Christian . Pourtant le 22 avril précédent GISCARD D’ESTAING avait déclaré qu’il conviendrait que le Parlement se saisisse en temps voulu de la question de la peine de mort .
Mais entre temps la majorité présidentielle avait perdu des points aux élections cantonales ...
De forts doutes subsistent sur la culpabilité de Christian RANUCCI. Gilles PERRAULT en a fait un livre sous le titre du « Pull Over Rouge » dont a été tiré un film .
Aujourd’hui Christian RANUCCI aurait un peu plus de 45 ans et GISCARD D’ESTAING, toujours député se pavane régulièrement à la télévision . Le sang qu’il a sur les mains ne se voit pas .
Jean Gilois
Al Gore et Bush
Quelle différence y a-t-il entre Al Gore et Georges Bush Jr, qui se présentent tous les deux à la prochaine élection présidentielle aux Etats-Unis ? Les deux candidats sont d’accord sur la façon de répartir le surplus budgétaire : un tiers pour les baisses d’impôts, un tiers pour réduire la dette du pays, un tiers pour des dépenses supplémentaires.
Les deux candidats nagent dans l’argent privé. Les deux sont favorables à la peine de mort, les deux sont favorables à un système national de santé, disent être attentifs aux questions d’éducation et souhaitent réduire la taille de l’administration.
Cependant, selon le mensuel Alternatives Economiques, il y a entre les deux une différence fondamentale : « Georges Bush s’acharne à donner aux Américains aisés davantage de moyens de retirer leur soutien aux pauvres, malades et mal qualifiés. Il veut des plans de retraite individuels pour remplacer les retraites par répartition. Il veut des comptes individuels de santé pour remplacer le système d’assistance médicale aux personnes âgées, il veut des bourses pour remplacer le financement des écoles publiques »
Comme les Américains aisés se déplacent plus que les autres pour voter, George Bush a ses chances !
(écrit le 22 janvier 2003)
Les partisans de la peine de mort aux Etats-Unis ont enregistré une spectaculaire défaite, vendredi 10 janvier 2003, avec la décision du gouverneur de l’Illinois, George Ryan, de gracier quatre condamnés à mort victimes, selon lui, d’une « injustice manifeste ».
Cet élu républicain, dont le mandat s’est achevé deux jours plus tard, a également commué, en peine de prison à vie, la peine de 163 autres condamnés à mort.
Ancien partisan de la peine capitale, George Ryan dit avoir pris la mesure de la faillite d’un système judiciaire « profon-dément défectueux » : 13 condamnés ont été innocentés et libérés dans son Etat. Ces décisions relancent le débat sur la peine de mort. Depuis des années, avocats et associations traquent les erreurs judiciaires. L’utilisation des tests ADN pourrait à terme bouleverser les méthodes d’enquête policières
Aveux sous la torture
Républicain, (le parti de George Bush) George Ryan a été le premier gouverneur à décréter un moratoire sur les exécutions, en janvier 2000, en raison de la multiplication des erreurs judiciaires. En octobre 2002, il a fait procéder à une révision générale des dossiers des condamnés.
La législation de l’Illinois lui donne autorité pour décider de mesures de clémence.
Le 10 janvier 2003 George Ryan a annoncé, dans un premier discours, qu’il avait décidé de gracier quatre condamnés victimes d’une « injustice manifeste ». Il s’agit de détenus qui, comme six autres, affirment que les aveux sur la base desquels ils ont été déclarés coupables leur ont été arrachés par la torture. Ils ont été interrogés, au début des années 1990, dans un commissariat de Chicago dont le chef, Jon Burge, a été chassé de la police après avoir été accusé de torturer les suspects de meurtre.
L’exemple du moratoire décidé en Illinois a été suivi par le Maryland. Le fait important, dans le cas de George Ryan, est que cet ancien ministre de la justice de l’Etat avait fait campagne pour le poste de gouverneur, en 1998, en défendant la peine de mort. Son évolution apparaît d’autant plus significative.
Manipulations policières
Les adversaires de la peine de mort font porter leur offensive sur la façon dont elle est prononcée. Plusieurs cas récents ont révélé des erreurs et, surtout, des manipulations policières.
La généralisation des tests ADN a bouleversé le cours de la justice américaine et, surtout, changé les termes du débat sur la peine de mort : comment avoir une confiance totale dans une peine par définition irréversible s’il est démontré par deux fois, par dix fois, par dix-sept fois, qu’elle allait être appliquée par erreur ?
Profession : pourfendeur d’erreurs judiciaires
En dix ans, grâce au « Projet Innocence » lancé par deux avocats, 123 personnes injustement condamnées ont été disculpées.
Tout a commencé en 1992, pour Peter Neufeld, le jour où des statistiques du FBI concernant les personnes arrêtées pour viol lui sont tombées sous la main.
Ces chiffres révélaient que, sur les 8 000 premiers cas étudiés de suspects arrêtés sur la foi d’indices scientifiques recueillis sur la victime (sperme, cheveux, fibres, etc.) et sur lesquels des analyses génétiques avaient pu être pratiquées, 2 000, c’est-à -dire un quart, avaient été disculpés par les tests ADN. « C’est là , explique Peter Neufeld, que nous avons commencé à comprendre l’ampleur du problème : cela voulait dire que des milliers de gens pourrissaient en prison, et même dans les »couloirs de la mort« , pour des crimes qu’ils n’avaient pas commis. »
« Aujourd’hui, nous pouvons affirmer que notre système est si vulnérable que nous sommes sans doute en train d’exécuter des innocents, poursuit Peter Neufeld. La seule raison pour laquelle nous ne sommes pas encore parvenus à le prouver, c’est qu’on ne nous autorise pas à pratiquer des analyses génétiques sur des condamnés exécutés. ». Toutes les requêtes d’ADN posthumes présentées par des avocats soupçonnant des erreurs judiciaires au Texas, en Floride et en Virginie - les trois Etats qui exécutent le plus - ont en effet jusqu’ici été rejetées par les parquets concernés (avec le soutien de George Bush).
Quelles sont les causes de cette faillite de la Justice aux USA ? « Lorsque les gens se sont mis à sortir de prison par douzaines, on a regardé de plus près et on a relevé des similitudes » : les erreurs d’identification des suspects, les aveux extorqués, les négligences de la police et du parquet et « un travail scientifique inadapté » dit Peter Neufled dans le Monde du 12 janvier 2003, Il aurait pu ajouter : « un racisme latent »
L.D.H.
La Ligue des droits de l’Homme ne peut que se réjouir d’une décision attendue par tous les abolitionnistes depuis plusieurs semaines ; une décision qui après l’avis de la Cour suprême concernant l’exécution de malades mentaux déclarée inconstitutionnelle indique clairement qu’un nouveau questionnement est apparu aux États-Unis sur le sujet. Cependant, le bien fondé de la peine capitale n’est absolument pas remis en cause par le pouvoir politique d’Outre-Atlantique à commencer par le ministre de la Justice, John Ashcroft. Pour le moment, ce sont les bavures du système (les condamnations à mort d’innocents notamment) qui sont dans le collimateur de l’opinion mais pas le système lui-même.
Il reste donc du chemin à parcourir pour abolir cette peine barbare indigne d’un peuple civilisé. Mais on n’en est sûrement pas là quand on entend par ailleurs un George Bush appeler à la guerre contre l’Irak, prêt à engager son pays dans une guerre préventive qui va faire des centaines de milliers de victimes civiles déjà durement éprouvées par 12 ans d’embargo et de bombardements quotidiens.
Le 15 janvier 2003 la Turquie a signé le protocole d’accord de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés, concernant l’abolition de la peine de mort en temps de paix.
C’est le 44e et dernier pays du Conseil de l’Europe, à signer ce protocole.
Ecrit le 23 février 2005 :
La mort au bout du QI
Son cas avait convaincu la Cour Suprême des Etats-Unis d’interdire l’exécution des attardés mentaux : trois ans après, son Quotient intellectuel (QI) ayant curieusement augmenté en prison, Daryl Atkins, accusé d’un meurtre, va être jugé l’été prochain pour déterminer s’il peut encore échapper à la mort.
La Cour suprême n’avait pas prévu que le QI d’un accusé puisse se modifier, explique son avocat. « Ils sont partis du principe que le retard mental est une condition permanente ». « Mais en raison de sa fréquentation constante des avocats ayant travaillé sur son dossier, M. Atkins a reçu davantage de stimulation intellectuelle en prison » que précédemment, explique dans un rapport le psychologue Evan Nelson, notamment en pratiquant la lecture et l’écriture, en tentant d’intégrer des notions de droit et en discutant avec des professionnels. En tentant de sauver sa vie, il pourrait ainsi s’être rapproché de sa mort.
Note du 21 mai 2008 :le miracle américain
Ecrit le 31 mars 2010
Dans le couloir de la mort
Agé de 47 ans, Hank Skinner vient de passer quinze ans dans le couloir de la mort, aux USA, après avoir été condamné à la peine capitale pour un triple meurtre. Son exécution était prévue le 24 mars au Texas. Mais depuis quinze ans il réclame que soient effectués des tests ADN sur les éléments retrouvés sur la scène du crime, jamais analysés, pour prouver qu’il est innocent.
Finalement, sous la pression internationale, l’Etat du Texas a différé l’exécution. Dix-sept condamnés sont sortis des couloirs de la mort américains grâce aux tests ADN ces dernières années.
Note du 3 septembre 2014
[Innocentés, trente ans après ..... http://www.lemonde.fr/ameriques/article/2014/09/03/etats-unis-innocentes-par-des-tests-adn-apres-30-ans-de-prison_4480724_3222.html]
L’organisation Innocence Project a estimé à 317 le nombre de condamnés innocentés par des expertises ADN aux Etats-Unis, dont 18 dans le couloir de la mort. Quelque 70 % d’entre eux étaient des personnes de couleur.