Ecrit le 3 décembre 2012
Vol au dessus d’un nid de coucous
Comme ce titre ne le montre absolument pas, il n’est pas du tout question de rendre un nouvel et énième hommage à un célèbre film que d’aucuns auront vu et revu.
Mon propos est plutôt de donner un amical coup de projecteur sur un oiseau à la fois bien connu et pourtant méconnu : je parle du coucou.
Il est bien connu par son cri répétitif et entêté annonciateur du probable retour du printemps dans nos campagnes. Quand on l’entend, on se dit que l’on va enfin pouvoir tomber la veste (d’hiver). C’est un petit bonheur, denrée devenant rare et donc précieuse dans ce monde de brutes, que de l’écouter au crépuscule, venant du fin fond de nos bois. LÃ où les bourgeons, par milliers de millions, mettent la dernière main à leur envol vers l’éclosion, préparant de concert la grand symphonie visuelle du renouveau de la vie, de la sève.
Il est méconnu parce que sans cesse fuyant, presque invisible. Qui saurait le décrire ou le dessiner aisément ? Est-il sombre ou bien très multicolore ? Si nous l’entendons beaucoup, nous le voyons peu, toujours en mouvement. Il a aussi une autre caractéristique : il a une plume à la patte ; je veux dire un poil dans la main, fainéant,quoi !! Pour exemple, il se juge indigne d’avoir à construire son propre nid. Alors il s’invite, il squatte, faisant fi de la propriété « privée ». Si jamais il s’entiche d’un nid bourré d’œufs du légitime occupant, il ne recule pas devant les basculer par-dessus bord pour prendre ses aises. Shocking, isn’ it ?
Enfin, et là j’avoue mon insondable ignorance, il donne son nom pour affectueusement surnommer les vieux avions. Mâte le coucou ! Ah ! vous avez dit AVION ?
Qui dit avion dit forcément aéroport. Logique, non ? Il était une fois une petite commune rurale, peinarde, qui ne demandait rien à personne, et qui se nomme Notre Dame des Landes. A un vol d’oiseau de Nantes ou de Blain. Il est possible que le mystérieux titre de cet article prenne maintenant plus de sens à vos yeux. Et il était (encore) une fois l’histoire d’un volcan éteint depuis 30 ans qui se réveille, avec toutes ses conséquences prévisibles. Si jamais vous attendez un avis tranché, je ne suis pas la bonne personne. A la Coluche, « je ne suis ni pour, ni contre, bien au contraire ». Par contre j’observe, j’écoute, je hume l’évolution et l’émotion grandissante autour de ce projet encore virtuel.
Le mot vol, d’après le dictionnaire usuel, possède deux sens fort différents qui décrivent :1 - capacité de se maintenir en l’air pour s’y mouvoir ; 2 - fait de s’emparer du bien d’autrui. J’ai une petite pensée émue pour notre coucou (oiseau) qui a si bien su mettre harmonieusement à son profit ces deux sens. Si le sujet est très sérieux, j’observe et j’entends, avec un brin de malice, que l’on semble tester la capacité et la qualité de l’air au-dessus et aux alentours de l’aéroport virtuel par un ballet (presque) incessant d’hélicoptères assez rasants (Ã chacun d’interpréter le sens donné). Puisque aucun n’est tombé (ouf !), l’air semble être validé comme porteur. Cela donne aussi, curiosité aidante, l’envie de se mettre aux fenêtres ou de sortir sur le seuil de sa porte et d’engager des conversations sans fin entre voisins (qui ne se connaissent pas forcément) sur l’identification des appareils, la trajectoire présumée et donc l’objectif en mire. N’est-ce pas, même de façon subie, l’embryon coûteux d’un lien social ? sourire.
Et puis en dessous de ces abeilles fortement bourdonnantes, comme en colère, et sans doute bourrées de la dernière technologie, il y a beaucoup de gadoue et une immense fourmilière humaine. Ça s’agite dans tous les sens et pourtant dans une partition orchestrée au millimètre. Dans le brouillard ou sous la pluie, parfois sous un soleil qui pâlit sous certains nuages artificiels et nauséabonds, parfois sous le tonnerre d’engins assourdissants ou d’envol d’ENVI (Engins Volants Non Identifiés), ça patauge dur.
Bien que la boue ternisse assez vite les couleurs, il y a confrontation certaine entre un groupe à aspect bleu foncé et noir et un groupe bien plus multicolore. Et j’en reviens à notre théorie du coucou. Il y a conflit sur la légitimité de l’occupation du territoire, avec vaste opération de « chai-ses musicales » sur près de 1 700 hectares. Pour mieux se rendre compte, imaginez, en gros, un rectangle de 8 km de longueur sur 2 km de large : c’est immense. C’est environ un tiers de la superficie de la Forêt du Gâvre pour les connaisseurs. L’un des mot-clé, ou plutôt ses initiales, est Z.A.D. . Dans le sens administratif, selon le Plan Local d’Urbanisme (P..L.U.) et la notion d’intérêt Général Public, c’est une Zone à Aménagement Différé, censée devenir un jour un aéroport international. Au sens de personnes et organismes en désaccord avec ce projet, c’est devenu une « Zone A défendre ».
Pourvu que chacun reste mesuré !
L’enjeu le plus immédiat est donc l’autorisation ou non de dénaturer, de bétonner ces terres agricoles pour y « transférer » l’actuel aéroport de Nantes-Atlantique (au sud de Nantes) vers le nord. Je mets volontairement des guillemets sur le transfert car Airbus n’est pas contre le fait de continuer à utiliser l’actuelle implantation. où bien cette énorme usine prendra aussi son envol pour ailleurs ?
Donc même un vieux coucou aura du mal à y retrouver son nid, malgré son vol frénétique. Je ne peux vous laisser avant une dernière pirouette : n’y aurait il pas comme le reflet d’une ombre de suspicion d’une guerre de vieux coucous au sein de l’U.M.P., du genre « casse-toi de là que je m’y mette » ?
signé : Pascal, de Blain