Ecrit le 24 avril 2013
Touche pas à ma rivière
Depuis environ un an a été engagée par le Syndicat du Don une étude sur les neuf ouvrages établis sur le cours moyen du Don, de Moisdon-la-Rivière à Nozay. Elle est destinée à prévoir les aménagements à réaliser en vue de « rétablir la continuité écologique » de la rivière, c’est-Ã -dire permettre un « transport satisfaisant des sédiments » et la circulation des poissons. L’étude a été confiée au bureau d’étude Egis Eau qui a élaboré un dossier pour chacun des barrages et proposé un certain nombre de scénarios d’aménagement pour chacun d’eux.
Selon l’association « Touche pas à ma rivière », le scénario présenté comme le meilleur est celui qui consiste à supprimer, araser ou abaisser le plus grand nombre possible de barrages. « Ceux-ci ont été construits au cours des siècles dans le but d’utiliser l’énergie hydraulique pour actionner des moulins à blé, à tan ou pour toute autre activité artisanale et industrielle nécessitant une énergie régulière. Faire de ces anciens aménagements hydrauliques les boucs-émissaires de la pollution de l’eau est une aberration, une atteinte au plus élémentaire bon sens ».
« La directive européenne vise la restauration de la qualité de l’eau et non une prétendue » continuité écologique « qui n’a jamais existé. c’est donc par une surenchère incompréhensible que la technocratie française prétend remettre les rivières dans l’état où elles étaient à l’épo-que néolithique, ce qui est d’ailleurs tout à fait utopique et impossible ».
l’association de préservation du Don et de la Chère « Touche pas à ma rivière », en plein accord avec la fédération des Moulins « continue donc à s’insurger contre de telles prétentions, inutiles, coûteuses et souvent nuisibles au cadre de vie des riverains. Elle va à l’encontre d’une saine politique de réserves d’eau dans les nappes phréatiques d’accompagnement qui permettent une bonne alimentation des puits des riverains ».
Des brochets nomadisés
Pour des habitants qui connaissent bien leur rivière depuis des décennies, la nouvelle politique concernant la circulation des anguilles pose problème. « La diminution du nombre d’anguilles dans la rivière ne peut être due à l’existence de barrages pluriséculaires : puisqu’elles franchissaient ces barrages et se pêchaient en grande quantité il y a quelques dizaines d’années tout le long de la rivière : mais ce phénomène est plutôt lié à la surpêche des civelles en baie de Vilaine et à l’existence même du barrage d’Arzal, dont la passe à poissons est sans doute insuffisante, et à la pollution des eaux de rivière en général ».
Mais voilà que le zèle de la technocratie vient de promouvoir un nouveau poisson migrateur : le brochet. désormais, le brochet doit donc sortir de ses frayères naturelles et pouvoir circuler librement. « Librement ? Pas tout à fait. Si les petits barrages des propriétaires privés et des communes doivent être » mis aux normes « pour permettre le passage des brochets, il n’est pas question de détruire le barrage de la Forge à Moisdon-la-Rivière pour lequel des travaux importants viennent d’être réalisés en vue de le renforcer. Si bien que les autres propriétaires de barrages à Moisdon se demandent pour quelles raisons ils feraient des dépenses pour permettre aux brochets de parcourir quelques kilomètres supplémentaires ».
« Au brochet, qu’au moins tous les amateurs de beurre blanc connaissent, il convient d’ajouter une espèce plus ésotérique : la bouvière. Vous ne connaissez pas la bouvière ? Nos spécialistes en ont découvert quelques spécimens dans le Don, et se sont immédiatement pris d’enthousiasme pour assurer sa migration ».
Aujourd’hui, chaque propriétaire de barrage est placé devant un éventail de scénarios qui vont de la destruction totale de l’ouvrage à l’aménagement de dérivations permettant la circulation de toutes les espèces de poissons, en passant par l’abaissement ou la destruction partielle des radiers, le remplacement des clapets par des vannes à guillotine, etc. Chaque scénario fait l’objet d’une estimation des coûts, avec une proposition de répartition des charges entre l’agence de l’Eau Loire-Bretagne, le Syndicat du Don et le propriétaire lui-même.
« Ces dépenses : souvent inutiles, et dont, soit dit en passant, l’économie serait bienvenue par temps de crise et de nécessaire réduction des dépenses de l’Etat : ne sont pas négligeables. Pour prendre un seul exemple, le scénario 3-2 pour le barrage de la Thénaudais à Jans, qui prévoit le remplacement du clapet par une vanne et le creusement d’une dérivation : coûterait 76 000 euros, dont 26 500 € à la charge de la commune propriétaire ».
Photo : Le Don, 2 février 2013, à La Fleuriais. Les poissons étaient contents :
la rivière submergeait le barrage.
Hydro-électricité
L’association relève cependant un point positif : « la prise en considération des projets de deux propriétaires privés qui souhaiteraient mettre en place sur leur barrage des petites unités de production d’hydroélectricité. d’autres seraient d’ailleurs intéressés s’ils se sentaient soutenus dans cette voie ». « Si l’administration et le Syndicat du Don s’engageaient dans cette voie d’avenir : conciliant la sauvegarde d’un patrimoine remarquable et l’orientation vers la récupération de toutes les énergies renouvelables pour entrer dans la voie de la transition énergétique (...) alors notre association se placerait avec enthousiasme au côté des propriétaires pour les soutenir dans leur effort, et en concertation étroite avec le Syndicat du Don si celui-ci change radicalement de politique après les élections de 2014 ».
Lettre et engagements
Quatre propriétaires de moulins et seuils de Moisdon, Treffieux, Jans et Nozay ont écrit au préfet :
Nous nous engageons, disent-ils, à :
- Assurer l’entretien de nos installations et leur fonctionnement régulier de manière à permettre l’écoulement normal des sédiments et la circulation traditionnelle des poissons.
- Organiser périodiquement des opérations concertées d’ouverture de vannes, comme nous l’avons déjà réalisé en janvier 2012 dans un cadre festif qui associe les populations riveraines.
- Maintenir fermées les vannes en période d’étiage de manière à assurer des réserves d’eau suffisantes pour la population piscicole, pour la préservation du cadre de vie des riverains et de l’intérêt touristique de la rivière, ainsi que pour l’alimentation des nappes phréatiques et des puits des riverains.
- Poursuivre l’étude des possibilités d’installation de petites turbines sur certains de nos barrages. c’est le seul domaine pour lequel nous demandons l’appui de votre administration et des collectivités publiques