Ecrit le 25 février 2009
Faites des enfants, Madame, on s’occupe du reste
La place et le rôle de la femme, dans nos sociétés modernes, sont bien difficiles à cerner :
« Faites des enfants, Madame, la Nation est reconnaissante » - En effet, chaque année, on se réjouit du taux de natalité en France, gage d’un renouvellement des générations, d’une jeunesse apte à travailler (et à payer la retraite des plus âgés !).
Oui mais, qu’est-ce qu’on en fait des enfants ?
La femme reste-t-elle à la maison ? c’est une solution. « Que fait-elle ton épouse ? » demande-t-on au mari. « Elle ne fait rien » . Ah bon ! Les femmes qui restent à la maison sont souvent réduites au rang de servantes de leur époux et des enfants. Elles se plaignent d’un horizon bouché, de contacts trop restreints. « Heureusement qu’il y a l’école pour nous permettre de rencontrer d’autres mamans ». Rester à la maison c’est dépendre financièrement de son mari, c’est vivre par procuration en quelque sorte. « Pendant quelques années je me suis enfermée » dit une femme qui trouve que le congé parental (3 ans) est trop long.
La femme va-t-elle travailler ? c’est souvent un (petit) avantage financier (du moins pour les catégories modestes) mais c’est aussi la porte ouverte aux reproches. « Mais Madame, vous ne vous occupez pas assez de vos enfants. Le soir, quand ils rentrent, vous n’êtes pas présente, ils sont livrés à eux-mêmes ! ».
Et, bien souvent, il n’est pas possible de compter sur le mari pour s’occuper des enfants. Il a son travail, souvent à des heures irrégulières, pas le temps d’amener les enfants à l’école, de réchauffer le repas préparé par maman, de surveiller leurs activités .
Par ailleurs, de plus en plus, la société pousse les femmes à travailler hors de chez elles, c’est une richesse pour la Nation. c’est aussi un avenir pour elles, car les cas de divorce ou de décès du mari créent des drames énormes pour les épouses.
Bref, pour les femmes, rien n’est simple.
Rose-Marie, 2 enfants, raconte : « La convention collective, dans mon entreprise, nous permet de prendre 5 jours en cas de maladie d’un enfant. Je l’ai fait, une fois, mais on m’a reproché d’être absente, d’avoir ralenti le travail de mon équipe à qui j’ai fait perdre une prime. On a des droits mais on nous culpabilise si on les prend »
Tu crèches où ?
La situation se complique dans nos régions rurales trop souvent dépourvues de halte-garderies et de crèches. Voici des cas dans le canton de Derval.
Isabelle, 4 enfants : « Je n’ai pas de famille sur place. Pas de voisins non plus. J’ai fini par trouver des gens en dépannage à 10 km. Mais je ne peux pas leur imposer les enfants tous les jours ».
Rose-Marie : « Nous avons nos parents à Châteaubriant, mais ils travaillent eux aussi »
Nathalie : « J’ai la chance d’avoir une belle-mère à proximité, mais elle a d’autres petits-enfants, il faut partager »
Halte !
Nathalie ajoute : « je jongle avec la Halte-Garderie à Derval : elle est ouverte quatre jours par semaine mais on ne peut bénéficier que de deux jours (ou 16 h). Et encore, pas l’été ! » - « L’été, il y a bien le Centre de Loisirs, mais il n’est ouvert qu’un jour entier par semaine, et le reste par demi-journées, et c’est pour les enfants à partir de 4 ans, et les places sont limitées ».
De plus les familles regrettent la mauvaise qualité des locaux de la Halte-Garderie de Derval : des préfabriqués trop chauds l’été, froids l’hiver, « et les gamins les uns sur les autres : on n’y fait souvent que de la garderie, pas de réelles activités éducatives » - Il y a aussi l’association « Les Potes de(s) sept lieux » qui accueille les 4-11 ans depuis septembre 2008, pour les mercredis et petites vacances « Ils sont plus professionnels, c’est intéressant, mais c’est seulement à Lusanger et Jans, et pas l’été ».
Et, bien sûr, il n’y a pas de crèche dans le canton de Derval, pas de halte-garderie itinérante non plus. La Halte de St Vincent des Landes (12 places) est toujours complète, celle de Marsac sur Don (10-15 places) aussi et il n’y a pas de structure analogue à Lusanger, Jans, Sion-les-Mines, Mouais.
Et alors, et les assistantes maternelles ?
En décembre 2007 il y avait 117 assistantes maternelles sur le canton de Derval, et 124 en décembre 2008. Pourtant les femmes rencontrées parlent de pénurie. « Les assistantes maternelles qui existent ne peuvent prendre davantage d’enfants ». Des mamans de Derval sont obligées de faire garder leurs enfants à Jans ou Marsac sur Don (quand on connaît les petites routes sinueuses qui y mènent, on se dit que ce n’est pas évident). Les mamans, à la sortie de l’école, regrettent cette situation, mais malheureusement elles n’ont pas encore pensé à aller en parler à leur maire, à faire le siège des conseils municipaux. Ceux-ci croient, de bonne foi, que tout va bien.
Bien sûr, il faudrait davantage d’assistantes maternelles. Des femmes accepteraient de faire ce travail mais se trouvent confrontées à des difficultés financières liées à l’aménagement du logement. « J’ai une maison avec un grand terrain autour, à 40 mètres de la route, mais je n’ai pas les moyens de payer la clôture qu’on me demande pour la sécurité de l’enfant ». « Moi il me faudrait une pièce de plus ! Ce n’est pas possible ! ».
Il faudrait aussi que soit menée une réflexion sur le rôle des assistantes maternelles. « Elles ne doivent pas se contenter de mettre les enfants toute la journée devant la télé ! » disent les mamans. [ce qui, heureusement, est rarement le cas]
Le RAM (Relais Assistantes Maternelles) de Derval, a connu quelques diffficultés (locaux mal commodes, manque d’un personnel stable) mais est en progression. Il le sera davantage quand il aura des locaux convenables au futur siège de la Com’Com’. Au delà de son rôle d’information sur la législation applicable à la profession, il organise des ateliers « découverte des livres » tournant dans les 7 bibliothèques, tous les 15 jours — et des formations PSC1 (prévention Secours Civique Niveau 1) : 36 assistantes maternelles formées depuis novembre 2007.
Le RAM envisage des activités complémentaires lorsque les nouveaux locaux de la Com’Com’ le permettront : par exemple des soirées-débat sur la parentalité, l’éducation, l’éveil, permettant de faire le lien entre les parents et les assistantes maternelles.
Canton de Derval
Une publication de la DRESS (Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques) révèle que 63 % des parents, en France, gardent eux-mêmes leurs enfants de moins de trois ans. 18 % préfèrent l’emploi d’une assistante maternelle tandis que 10 % choisissent un mode de garde collectif.
A condition de le trouver, ce mode de garde collectif [un multi-accueil est en projet à Derval] ! Et à condition que l’accueil d’urgence soit réellement possible. Et à condition que les heures d’ouverture puissent s’adapter aux nombreux horaires atypiques.
Depuis octobre 2006, grâce au Conseil Général, 18 familles nantaises bénéficient de la garde à domicile en relais pour les familles modestes ayant des horaires décalés. Le coût est de 1 à 2 € de l’heure. Mais cela ne concerne que Nantes alors que nos cantons ruraux ont des besoins analogues ! (Rens. 02 51 80 61 20). (1)
En résumé dans le canton de Derval
– Haltes-garderies insuffisantes
– Manque d’assistantes maternelles
Réflexion à poursuivre sur
– Multi-accueil
– Halte-garderie dans chaque commune
– Politique éducative du RAM
– Horaires atypiques
Le projet de territoire de canton intégrera sans doute cette politique de l’enfance.