Ecrit le 18 avril 2012
Un attentat financier pour le 16 avril
A six jours des présidentielles, les policiers du RAID seront-ils mobilisés ? La Bourse allemande privée Eurex (spécialisée dans les produits financiers) mettra en vente un produit financier, à partir du 16 avril, permettant la vente à découvert. Voici le mécanisme :
Le 1er janvier 2012 je vends 10 000 titres (que je ne possède pas) qui valent actuellement 100 euros. Je parie que la transaction sera faite le 1er janvier 2022 au prix de 100,7 € chacun. A cette date je fournirai les 10 000 titres. Mais je spécule à la baisse, c’est-Ã -dire que je m’attends à ce que la valeur du titre soit moins élevée.
Effectivement, cela se produit et je peux acheter ces titres à 100,5 €. J’achète donc 10 000 titres à 100,5 € et je les vendrai au 1er janvier 2022 à 100,7 €. j’aurai fait une plus-value de 0,2 x 10 000 soit 2000 €.
Pire : « la vente à découvert à nu » sera autorisée, c’est-Ã -dire que je n’aurai même pas à payer les titres achetés : on se contentera d’un achat virtuel. Ainsi, j’aurai gagné réellement mes 2000 euros avec un simple jeu d’écritures.
Jusqu’Ã maintenant ces opérations étaient réservées aux banques, maintenant elles pourront être faites par n’importe qui (entreprise ou particulier). Selon Mediapart : « Comble du cynisme calculateur, des ordinateurs peuvent en » trading automatique " jouer sur des écarts très courts dans le temps et ce à large échelle. Un programme informatique spécifique peut pratiquer la vente et le rachat très rapide de titres dès qu’il s’oriente à la baisse.
A grande échelle, cela présente le risque d’amplifier les baisses en déformant les cours. Ce mécanisme est très dangereux pour les Etats, les entreprises et les investisseurs ".
Bien entendu, cela ne concerne pas M. et Mme Toulemonde qui ont déjà bien du mal à ce que leur banque leur accorde un prêt ou se font refuser des chèques pour 20 euros ...
Ce système est avantageux pour les traders qui paient des frais ridicules avec ces contrats (1 à 2 euros pour 100 000 euros misés !) pour parier sur de la dette française à 10 ans. Ce contrat est avantageux aussi pour Eurex qui touche des commissions pour chaque nouveau produit traité. Ces commissions sont très faibles mais vu les volumes traités, cela devient tout à fait rentable pour l’opérateur. Ainsi, il se traite 700 000 contrats à terme sur les obligations allemandes à 10 ans, chaque jour. Ce contrat est avantageux pour les spéculateurs qui, disposant de 1 000 000 euros d’argent liquide, peuvent parier sur un montant de 30 000 000 d’euros de dette française !
En cas de nouvelle crise et de défiance envers la France, la possibilité laissée aux spéculateurs de miser à la baisse, en masse et avec des coûts très faibles est un danger évident pour la dette française.
Pour Pascal Canfin, eurodéputé Europe-Ecologie-Les-Verts, ce nouveau contrat à terme prochainement proposé par Eurex, risque d’accroître la spéculation sur la dette française.
Interrogé par « Les Echos », Jean-Pierre Jouyet, président de l’AMF (Autorité des Marchés Financiers), a lui-même regretté un calendrier malheureux : « Eurex ne donne pas un signal convenable au marché. Le moment est inopportun, compte tenu de l’élection présidentielle en France, et des tensions sur les taux espagnols constatés en début de semaine. Cela sous-entend qu’il y a un risque sur la dette française, puisque ce contrat donne la possibilité aux investisseurs de se couvrir. C’est un message négatif et quel que soit le résultat des urnes », indique -t-il.