Ecrit le 14 mai 2014
Augan
Soulvache et Eancé n’ont plus aucun commerce ; Fercé, Ruffigné et Noyal sur Brutz, n’ont plus qu’un café multifonction ; le centre ville de Châteaubriant se vide... Pourtant les cafés, les petits commerces sont des lieux de vie, d’échange et de rencontres . La boulangère peut s’étonner de l’absence de la doyenne de la ville qui chaque matin vient prendre son pain, « Le comptoir d’un café est le parlement du peuple. » disait Balzac. L’épicière permet aux personnes âgées de garder une certaine autonomie... Les zones com- merciales aseptisées gardent-elles ce rôle social ? On peut en douter.
C’est pourquoi, dans une petite commune d’irréductibles, un collectif a permis la création d’une coopérative de services de proximité : Le champ commun. C’est à Augan (Morbihan) que ces personnes qui voulaient vivre et travailler au pays ont créé tout d’abord un bar/épicerie. Sa première graine fut une brasserie et sa seconde, en cours de germination, est une auberge.
L’épicerie fait la part belle aux producteurs locaux et si possible bio mais elle n’oublie pas que les habitudes mettent du temps à changer et garde de nombreux produits traditionnels. Ce garde-manger laisse ainsi les habitants se rendre compte par eux-mêmes que ce sont leurs produits les meilleurs. Comment résister aux bons yaourts de brebis de la ferme du Broutay à peine plus chers mais tellement meilleurs que les yaourts au lait OGM ? C’est ainsi que les produits de grande distribution disparaissent des rayons car ils ne sont plus rentables. « Les agri- culteurs sont des acteurs importants de l’environnement. Ils doivent vivre au rythme des saisons, faire vivre le terroir, retrouver cette logique économique qui faisait la dynamique de nos régions et conserver cette relation directe avec le client pour le rassurer tout en valorisant son activité. » comme le remarque l’un des producteurs.
Ce bourg de 1 500 habitants n’avait plus de bar. C’est le début du « chacun chez soi ». Maintenant, ils ont un bar-café-concert. Les activités y sont aussi diverses que les personnes qui com- posent le collectif. Le bar fonctionne en commissions dont une s’occupe de la programmation. Il y a des concerts, des soirées jeux, débats, tricot, dessin... C’est ainsi que chaque mois a lieu un « café mémoire » où des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer , ou pas, échangent. Le café joue, entre autres, son rôle de lien intergénérationnel.
Ensuite le cercle vertueux est enclenché. Le bar a besoin de bière, ils la produisent. Difficile de faire plus directe comme consommation. Puis les débats, les échanges se seraient bien prolongés donc l’auberge est en création avec un resto pour manger les produits locaux.
Mais comment font-ils tout ça ? La devise de cette coopérative c’est « Tout seul on va plus vite, ensemble on va plus loin. » Bien sûr, les employés ne sont pas payés toutes les heures qu’ils font, ils s’auto-exploitent en quelque sorte. Est-ce cela une alternative au capitalisme ? Mais au moins, ils créent, ils construisent, ils échangent...Bien sûr, les personnes de la coopérative ne sont pas toutes très investies, il a fallu rappeler aux gens que sans eux, il ne pouvait y avoir d’animations au bar, que sans eux les heures de travail seraient insupportables... Mais quand les choses sont dites, que chacun y met du sien, que l’on sait que cela va se faire dans la convivialité, la motivation revient.
Il y a maintenant sept salariés qui ne comptent pas leurs heures et ont juste le SMIC. Mais, depuis 2010, le lieu a progressé, les gens y échangent, y créent et les envies sont encore là . C’est un peu un service public mais coopératif...
Signé : PL