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Amis de l’histoire
Après la grand-messe du lundi de Pâques, le roi, le front ceint d’une couronne d’écorce de saule rehaussée d’oreilles de lièvre, son sceptre à la main, réunit ses sujets. Un nouveau roi est alors choisi parmi les jeunes hommes non mariés de la commune, puis les deux monarques plongent nus dans l’étang, (sauf un linge ante pudenda), bain au cours duquel la couronne change de tête. Ce jour-là , le prieur doit au nouveau roi « chambre et feu », quinze livres de beurre et une poêle à frire les œufs. Chaque ménage de la commune doit deux œufs sous peine de confiscation de ses poules et les mariés de l’année doivent quatre deniers « autrement seroient portez en l’eau ». Telle est l’histoire du « Roi de Carbay » une des 37 communes qui ont donné aux Amis de l’Histoire les indications qui leur ont permis de faire une intéressante exposition
Savez-vous que MOUAIS s’écrivait MOI dans le cartulaire de Redon (852) et que cette commune a la seule poutre de gloire de la Loire-Atlantique (sculptée par Fréour dans un bois de l’an 1000) ?
Derval signifierait « La Vallée des Chênes ». C’est le sire de Derval qui, en 1360 créa le franc-or pour obtenir la libération du Roi de France Jean le Bon, prisonnier des Anglais.
La Grigonnais tirerait son nom du breton Gourguenez (talus et fossés de terre). Louisfert serait Locus Feri (le lieu du fer), Grand Auverné serait issu du gaulois Vernos qui désigne l’aulne (ou le vergne en vieux français). Erbray s’écrivait autrefois Arbré, territoire couvert de bois. Quant à La Chapelle Glain, cela viendrait de Glen, terre profonde ou plaine.
Volvere, Volvens, Volventis : le mot latin veut dire tourner. St Julien de Vouvantes serait ainsi dénommée car un ruisseau la contourne en partie. Et Villepôt, serait ville-post, le dernier village aux confins des comtés de Nantes et Rennes.
Souvenirs de François Villon (1) venu à St Julien de Vouvantes, de René Guy Cadou qui enseigna à Louisfert, de la famille Huard qui marqua la vie économique de la région, du Docteur Bernou qui guérit tant de tuberculeux, de Guy Môquet et de tous les réseaux de Résistants de la dernière guerre : au fil des panneaux d’exposition l’Histoire fut très présente, à côté des personnages locaux et des légendes. On dit par exemple qu’à l’étang de Gruellau à Treffieux, le village d’Inde dort au fond des eaux et que la nuit de Noë l on entend ses cloches. Une sirène d’une beauté incomparable surgit parfois de l’étang après le coucher du soleil, pourtant dans ses bras des fleurs de lys. Ceux qui ont le privilège d’une telle vision sont riches et heureux pour le restant de leurs jours.
On dit qu’un veau d’or serait enterré au pied de la motte féodale du Buron à Issé. On sait que les moines de la Primaudière avaient une astuce pour se dispenser du jeune sans enfreindre la règle. On raconte la vengeance des chouans le 27 juillet 1794 à Fercé.
Et chacun espère retrouver un jour ces récits sur un livre publié, après l’exposition, par les Amis de l’Histoire.
Ecrit le 29 septembre 2004
Sainte Rita
Patronne des cas désespérés
L’humble Rita, femme douce mais « ordinaire »
n’a pas accompli de miracle spectaculaire.
Mais on la vénère parce qu’elle aurait
le don de venir en aide aux plus infortunés.
Le professeur Yves Chiron a noté dans sa véritable Histoire de sainte Rita (Perrin, 2001) la difficulté de retracer avec certitude les éléments de la vie de Rita. Mais la vérité historique ne doit-elle pas céder le pas devant la légende ?
Miracles en série
Antonio et Amata sont des paysans pieux qui vivent en Ombrie, à 150 km au nord de Rome. Ils désespèrent d’avoir une descendance mais, premier miracle, une voix annonce à Amata qu’elle va accoucher d’une fille et devra lui donner le nom de Rita, en l’honneur de sainte Margherita (margarita veut dire « perle » en latin).
C’est l’époque de la guerre de Cent Ans en France, de la peste noire qui fait des milliers de victimes dans toute l’Europe. L’Eglise se déchire autour de ses papes : Grégoire XI, exilé en Avignon, est revenu mourir à Rome. Urbain VI, qui lui succède, se rend odieux à ses cardinaux qui élisent alors Clément VII ; celui-ci revient organiser la curie à Avignon. C’est la période du grand schisme (rébellion) d’Occident. Urbain VI et Clément VII se livrent une lutte sanguinaire et fort peu chrétienne pour occuper le siège de saint Pierre.
Rita naît le 22 mai 1381 à Roccaporena, près de Cascia. Un jour, alors qu’elle dort dans sa corbeille sous un arbre, un paysan qui vient de se blesser avec sa faucille voit un essaim d’abeilles tourner autour de la petite fille. Les abeilles entrent dans sa bouche sans la piquer ; elle sourit. Le paysan veut chasser les insectes et tend sa main blessée, qui aussitôt guérit. Les parents, le village, ne savent comment interpréter ce présage. Un miracle ?
La fillette est élevée dans la prière et l’amour de Dieu, se dévouant dès l’adolescence à soulager ses parents devenus vieux, refusant toute coquetterie. Dès 14 ans elle songe à embrasser une vie religieuse, mais ses parents envisagent pour elle un avenir différent et la fiancent un jour à un certain Paolo. Mariage forcé pour une future sainte.
Paolo, dit-on, est jouisseur, brutal et buveur. Rita se soumet à la volonté de ses parents, car ce Paolo, d’une condition plus aisée que la leur, saura les secourir mieux qu’elle-même.
Paolo est alcoolique et violent. Rita montre tant de douceur que ses voisines la surnomment « la femme sans rancune ».
Mais voilà que, troisième miracle, après dix-huit ans de calvaire conjugal, quand elle met au monde deux jumeaux, le caractère de Paolo s’adoucit, il se repent sincèrement, se convertit et le couple connaît enfin un bonheur. De courte durée.
Des hommes tendent un soir une embuscade à Paolo et le poignardent. Rita est veuve mais elle pardonne aux meurtriers de son mari. hélas pour elle, ses deux fils entendent exercer leur vengeance. Rita les supplie en vain de n’en rien faire et s’adresse à Dieu : qu’Il les rappelle à lui plutôt que de les laisser devenir criminels. Les jumeaux tombent malades peu après et se convertissent en mourant. Quatrième miracle.
désormais sans famille, Rita est libre de réaliser sa vocation religieuse. Elle va frapper à la porte du monastère de Cascia, mais l’abbesse des soeurs augustines lui en refuse l’entrée. Trois fois : la congrégation instituée pour les jeunes filles ne saurait accueillir des veuves qui ont commis le péché de la chair du fait de leur mariage. Mais voilà un cinquième miracle : un soir de Noë l, saint Jean-Baptiste, saint Augustin et saint Nicolas la transportent dans l’enceinte du monastère. L’abbesse, décontenancée par un tel parrainage, accepte Rita comme novice et la met à l’épreuve.
On ne lui épargne ni les brimades ni les humiliations et sa patience ne fléchit pas. On lui ordonne absurdement d’arroser chaque jour un bout de bois mort. Rita obéit et le bois fleurit et donne des grappes de raisin. Sixième miracle.
Admise à devenir nonne, elle s’engage à suivre la règle de saint Augustin. Peu à peu sa réputation s’étend : ceux qui s’adressent à elles voient leurs voeux exaucés. Les prières de Rita sont entendues du ciel, ce qui ne manque pas de provoquer la jalousie de ses consoeurs.
En 1443, lors du Vendredi saint, Rita est en prière devant le crucifix de l’autel. Une épine de plâtre de la couronne du Christ tombe sur elle et la frappe en plein front. Dès le lendemain, la plaie s’élargit et dégage une odeur repoussante. Certaines religieuses du monastère interprètent ce stigmate : une punition pour les moments impurs de sa vie passée. La blessure ne s’efface que le temps d’un pèlerinage à Rome pour les fêtes du Jubilé et, de retour à Cascia, se rouvre, purulente et si malodorante que l’on isole Rita dans une cellule où elle vit en observant un jeûne quasi absolu.
Pendant l’hiver 1457, épuisée, elle demande à sa cousine de lui apporter une rose de son ancien jardin. Au milieu du jardin enneigé, la cousine trouve une rose splendide, la lui rapporte. L’opération se renouvelle avec deux figues. Miracles, miracles. A bout de forces, Rita expire le 22 mai de la même année, à 76 ans. A l’instant de sa mort, sa plaie se transforme en un rubis, les cloches se mettent à sonner d’elles-mêmes, sa cellule nauséabonde est inondée de lumière et remplie d’un parfum délicieux. Miracles, miracles. Depuis cinq siècles et demi, son corps repose, intact et suave comme la rose, dit-on, dans une châsse de verre de la basilique de Cascia. Miracles, miracles...
L’humble Rita de Cascia, morte en 1427, ne fut béatifiée qu’en 1628 et canonisée en 1900, comme si l’Église n’avait enregistré qu’à contrecœur l’intense piété entourant la « patronne des causes désespérées ».
D’où vient le culte voué à Rita ? Elle n’a pas fondé d’ordre religieux ni produit d’écrits spirituels, les prodiges qui ponctuent son parcours terrestre sont peu spectaculaires, aucun tyran ne l’a suppliciée ; on serait tenté - en faisant la part des enjolivements habituels en la matière, la part des fleurs - de voir en elle une femme remarquable, douce mais « ordinaire ».
Pour des millions de croyants, pas toujours catholiques, elle calme les orages, résout les situations sans issue, guérit les incurables... et accorde le beau temps pour la Foire de Béré. A tort ou à raison, elle incarne la sainte du dernier recours, celle qui ne laisse jamais tomber ceux qui font appel à sa bonté. D’innombrables ex-voto et livres d’or lui en rendent grâce, unanimes et souvent anonymes.
Patronne des vertus de trottoir
A Paris, au 65 boulevard de Clichy, dans l’enceinte du lycée Jules-Ferry, une chapelle Sainte-Rita dépend de la paroisse de la Trinité. Un local austère sinon pauvre, dépouillé d’ornement et à peine signalé, un banal rez-de-chaussée en plein Pigalle, au milieu des sex-shops et face au Moulin Rouge. Il semble que l’Église, en affectant à Rita cette ancienne chapelle du XIXe siècle, ait voulu répondre au désir légitime exprimé par les prostituées d’avoir un lieu de prière reconnu. Sans prétendre égaler Marie Madeleine, la pécheresse amie du Christ, ces « femmes de mauvaise vie » ont estimé leur vie suffisamment mauvaise, tolérée avec hypocrisie et cyniquement exploitée, pour mériter cet asile discret. D’où la confusion qui s’est parfois établie, faisant de Rita la patronne des vertus de trottoir.
Mais la chapelle accueille majoritairement des fidèles hommes ou femmes, jeunes ou vieux, que rien dans leur tenue ni leurs attraits ne désigne plausiblement au commerce de la chair.
D’après un texte de Michel Braudeau
Le Monde du 28 juillet 2004
A Châteaubriant la statue de sainte Rita a été sculptée par Jean Fréour vers 1950, dans le linteau de la porte de l’ancien immeuble « Le Sabot Rouge » situé dans la Grand Rue. La statue a été offerte par une famille de gitans autrefois internée au Camp de Choisel pendant la guerre de 1939-45.
Cette statue est l’objet d’une intense dévotion, comme en témoignent les fleurs et les cierges qui brûlent en permanence au pied de la statue.
On dit que, chaque année le président de la Foire de Béré y brûle un cierge pour avoir du beau temps. Cela ne semble pas toujours efficace. Quelqu’un, au ciel, ferait-il la différence entre la vraie croyance et le folklore ?
Ecrit le 9 février 2005 :
Festival : que d’la goule
Un groupe de jeunes du pays de Châteaubriant a l’intention de créer un événement autour de la parole à Châteaubriant, du 28 juin au 3 juillet : mémoire castelbriantaise, chanson, poésie et autres moments insolites.
Le groupe se propose de collecter des témoignages sur la vie dans les années 50 au Pays de Châteaubriant, débouchant sur une expo photo et des enregistrements sonores (ou vidéo), démarche populaire de transmission de la mémoire individuelle et collective.
Si des personnes acceptent de témoigner ... si elles ont des articles de presse, des photos et tous documents ... qu’elles prennent contact avec Denis Prodhomme au 02 40 81 12 54 ou 06 22 66 59 30
Ecrit le 9 mars 2005 :
Ville d’art et d’histoire
Ne détruisez pas tout
Avez-vous remarqué comme la ville de Châteaubriant change ? Est-ce en bien ? Est-ce en mal ? Chacun a son point de vue. Il est cependant intéressant d’attirer l’attention sur des destructions intempestives, victimes d’un « modernisme » mal compris.
La ville de Châteaubriant a l’ambition de devenir une « ville d’art et d’histoire ». Encore faudrait-il qu’elle en ait les caractères. Depuis plus de 10 ans l’Office de Tourisme a fait de gros efforts pour mettre en valeur le cœur de ville et pour démontrer qu’il y autre chose à voir que le château. Dans ce sens, la municipalité actuelle a bénéficié d’une opportunité : l’achat d’un petit magasin inoccupé, flanquant la Porte Neuve : sa destruction a accentué le caractère historique du bâtiment. Encore faudrait-il que des pancartes disgracieuses ne viennent pas boucher la vue.
Dans un passé plus ancien (50 ans environ), l’ancien Sabot Rouge a été détruit dans la Grande Rue. Son architecture et ses sculptures, semblables à celle que l’on peut voir à la Maison de l’Ange , auraient renforcé le caractère historique de la Grand Rue.
De même que les maisons détruites à l’entrée de la rue du pélican, et celles de l’entrée de la rue de la Coquerie.
La Maison de l’Ange , elle-même, a failli être démolie. Heureusement que la Direction des Affaires Culturelles, à l’époque, a bagarré pour la conserver.
Le Marché Couvert , lui aussi, a failli être rasé
pour faire un parking en centre ville.
L’hôtel du Boisdulier a été démoli quand Maganis a voulu faire un quai de déchargement de marchandises. Cet hôtel a été mairie de la ville, tribunal, presbytère.
Dans la rue Tournebride, une vieille maison, située sur le Rollard, a failli être démolie parce que l’adjoint au maire de l’époque trouvait que ce n’était qu’un tas de pierres.
Un acquéreur privé l’a, heureusement rénovée.
Tout à côté l’ancien rendez-vous des laveuses de la Torche, a fait aussi l’objet d’un permis de démolir, heureusement refusé.. Depuis, un particulier a fait une belle rénovation.
Dans la Rue Basse, une vieille maison a été abattue : elle a permis de dégager la vue sur une belle tour escalière. Malheureusement la perspective est gâchée par un dépôt d’ordures généralement sale et malodorant.
Sur le site des Vauzelles, les anciens bâtiments de l’usine Huard ont été totalement rasés. Ils étaient splendides, en belles pierres de pays, ocre et pourpre. Il aurait été souhaitable de conserver l’un d’entre eux, pour l’histoire du site. Suffisamment vaste et solide, il aurait pu être aménagé pour accueillir des activités de la ville. A la place se construisent des bâtiments modernes sans caractère.
Sabot Rouge, Boisdulier, Vauzelles : voilà des pans d’histoire de la ville qui ont disparu
Un autre bâtiment est actuellement menacé : celui des établissements Maussion (échelles) au bas de la route de Fercé. Ce lieu est chargé d’histoire. C’est là en effet que fut la première usine Huard avant qu’elle ne s’installe sur le site des Vauzelles. Elle a donné un essor industriel
à la ville. Et une renommée : Huard n’a-t-il pas été le leader européen de la charrue. ?
La première usine Huard est menacée de démolition, car la municipalité veut y aménager un rond-point.
Des ronds points, des parkings :
il n’y aura bientôt plus que cela à Châteaubriant. On circulera, c’est sûr, mais on ne restera pas à Châteaubriant si la ville perd son caractère et son histoire.
L’histoire de France pour les nuls, de JJJulaud
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