Ecrit le 11 avril 2012
600 milliards d’euros
600 milliards d’euros : c’est la somme astronomique qui se cache depuis des décennies dans les paradis fiscaux, soit près de 10% du patrimoine des Français. Comment cette évasion fiscale massive a-t-elle été rendue possible ? Et pourquoi l’évasion de ce patrimoine fait-elle l’objet d’une telle omerta judiciaire, alors que les institutions de contrôle, la police, la justice, la douane, les services de renseignements, etc. en possèdent l’essentiel des preuves ? Quand on connaît la situation des comptes publics de la France, la question mérite d’être posée
Exploitant une somme impressionnante de données ultraconfidentielles, l’auteur du livre « Ces 600 milliards qui manquent à la France » met au jour l’étendue, les circuits, les mécanismes secrets de cette gigantesque fraude fiscale. Il montre quelles techniques sophistiquées - et parfaitement illégales - utilise une grande banque étrangère (UBS) pour opérer sur le territoire français, pour approcher les fortunes privées, celles du showbiz, du sport et des affaires. s’appuyant sur des témoignages exceptionnels, il décrit le manuel pratique fourni aux employés, leur livrant conseils et astuces pour rester discrets et ne pas se faire prendre par le fisc, il révèle comment s’organise l’impunité de tous ceux qui participent à ce système qui soustrait à la France une part colossale de sa richesse nationale.
Le retour d’ascenseur
Pourquoi dès lors aucune poursuite judiciaire n’a-t-elle été engagée à ce jour, alors que les soupçons de fraude se sont multipliés au cours de ces dernières années« ¯ ? Le journaliste s’interroge et évoque une piste explosive »¯ : le retour d’ascenseur. En échange d’un financement politique, certains dirigeants seraient prêts à demander la plus grande clémence aux services fiscaux de l’Etat pour certaines grandes fortunes. On croise alors d’autres réseaux et circuits de financement, politiques cette fois
« Ces 600 milliards qui manquent à la France » par Antoine Peillon, grand reporter à La Croix.
Sarko et les rentiers
Tout juste créé, l’Institut des politiques publiques (IPP) s’est intéressé à l’évolution de la fiscalité et de la redistribution en France entre 1997 et 2012.
On peut résumer ainsi : le gouvernement Jospin a mis en place des mesures qui ont plus largement bénéficié aux revenus des plus modestes. Les gouvernements qui se sont succédé pendant les dix années suivantes ont plutôt eu un effet inverse, en diminuant les prélèvements pour les plus hauts revenus, en particulier pendant le quinquennat de Jacques Chirac. Le dernier quinquennat, celui de Nicolas Sarkozy, a eu un effet contrasté, très favorable aux plus hauts patrimoines, alors que l’imposition des hauts revenus était augmentée dans le même temps. Et, globalement, les plus riches sont, proportionnellement à leurs revenus, moins taxés et imposés.
Depuis dix ans (c’est-Ã -dire depuis que la droite est au pouvoir, ndlr) le taux de prélèvements obligatoires, en pourcentage du revenu national (PIB), a baissé entre 2002 et 2012 de 0,6 point pour l’ensemble de la population, et de 3,6 points pour les 1% les plus aisés. Ce qui revient à dire que les plus riches ont été six fois plus favorisés que les autres.