Ecrit le 17 septembre 2008
Ils iront au Tribunal
Trois membres du Collectif de soutien aux personnes sans-papiers de Rennes seront jugés le 19 septembre 2008 pour « injures publiques » envers la police et « diffamation ». Par exemple pour avoir stigmatisé les contrôles « au faciès ». Le ministère de l’Intérieur a horreur qu’on aborde ce sujet. Aussi ne craint-il pas de s’attaquer à la liberté d’expression de ses opposants. Il s’appuie pour cela sur cette bonne vieille loi sur la presse de... 1881, dont l’application laisse une place insensée à l’arbitraire.
Les trois militants bretons comparaîtront devant le tribunal correctionnel pour avoir exprimé, d’une façon un peu virulente, la réalité des conséquences directes de la politique menée par Brice Hortefeux et sa chasse aux étrangers. voir plus bas dans cette page
Voici un extrait du tract incriminé, sous forme d’un texte présentant la profession de policier aux frontières (PAF)
" Le matin, vers 6 heures, tu commences ta journée et tu vas cueillir quelques sans-papiers à leur domicile grâce aux fichiers préparés par la préfecture ou grâce à ces quelques bons citoyens qui dénoncent leur voisin. Si tu les rates, ne t’inquiète pas ! Dans la journée, tu peux aussi organiser des contrôles d’identité au faciès. Tu te postes à la gare ou dans le métro et tu contrôles en priorité les arabes et les noirs. Et si jamais tu les rates encore, alors n’hésite pas à mettre le paquet. Tu te postes devant la Croix Rouge , devant un foyer pour étrangers ou encore devant une association qui s’occupe d’aider les sans-papiers, et là c’est bingo !
Tu as toujours apprécié l’ordre, la propreté, l’intimité ? LÃ encore, notre service te donne l’occasion d’accompagner les sans-papiers dans des centres spéciaux que l’on appelle les centres de rétention.
Ils sont parqués de force par dizaines et c’est toi qui les déplaces, qui les emmènes à l’hôpital, au tribunal, à leur consulat et même dans leur pays.
Si tu as peur des arabes et des noirs, sache que tu peux maintenant menotter les sans-papiers à chaque fois que tu les déplaces. Ça rassure et c’est rigolo parce que, eux, ils ne comprennent pas pourquoi on leur met des menottes alors qu’ils n’ont rien fait.
Et si tu aimes les enfants, tu trouveras dans notre service beaucoup de satisfaction. Maintenant on peut interpeller les enfants, les mettre en garde à vue avec leurs parents ou encore les placer en rétention. Oui oui, notre métier autorise l’enfermement des enfants. Cela facilite des relations de proximité avec toutes les catégories d’âge "
M. Hortefeux n’a pas apprécié cet humour et poursuit trois militants, pris au hasard. Et ce n’est q’un début !
La répression sera d’autant plus facile qu’elle aura été préparée par le fichage généralisé que vont permettre les fichiers Edvige, Cristina et le logiciel Ardoise. Tout est lié. La criminalisation de toute opposition avance en Sarkozie. A marche forcée.
Les trois tracts incriminés
Voici ces trois tracts :
Ecrit le 17 septembre 2008
Ardoise
Le logiciel Ardoise sert à enregistrer des informations sur les personnes impliquées dans des enquêtes (qu’elles soient victimes, témoins ou prévenues), en particulier leur orientation sexuelle, leur handicap ou leur appartenance syndicale. Il doit remplacer dans les prochains mois l’ancien système de rédaction des procédures dit « LRP ».
Ce logiciel est également connecté au fichier STIC (Système de traitement des infractions constatées).
infractions constatées). Testé depuis le début de l’année, le logiciel Ardoise contient une rubrique « État de la personne », dans laquelle les policiers sont amenés à préciser si leur interlocuteur est « homosexuel », « transsexuel », « handicapé », « sans domicile fixe », « personne se livrant à la prostitution », « travesti », « relation habituelle avec personne prostituée », « personne atteinte de troubles psychologiques », « usager de stupéfiants », « permanent syndical ».
Le Syndicat national des officiers de Police déclare : « Nous sommes scandalisés par ce logiciel, dont l’utilisation - en l’état - va à l’encontre des valeurs républicaines » explique au quotidien Metro, son porte-parole David Barbas.
Ecrit le 17 septembre 2008
Pauv’Con
Un Mayennais qui était juché sur son vélo sur le côté d’un boulevard où la voiture de Nicolas Sarkozy, en visite à Laval le 28 août, s’apprêtait à passer, a été interpellé par des policiers en civil. Selon lui, alors qu’on lui tenait les bras pour l’immobiliser, il a réussi à brandir, à l’approche de la limousine, la pancarte qu’il avait sous ses vêtements : une affichette en carton portant l’inscription « Casse toi pov’con » . Il sera poursuivi pour "offense au chef de l’Etat. Il doit comparaître le 23 octobre devant le tribunal correctionnel de Laval.
(Note du 5 novembre 2008 : cette personne a été condamnée à 30 euros d’amende avec sursis .... une claque judiciaire pour Sarkozy ! : http://www.maitre-eolas.fr/2008/11/06/1199-t-as-pas-trente-euros-que-j-offense-le-president)
Et ... PAF !
Note du 10 décembre 2008
Le procès, prévu le 19 septembre 2008 a été repoussé au 12 décembre.
Un communiqué précise ceci :
Rappel des faits et actualité de la procédure :
En juin 2008, nous, collectif de soutien aux personnes sans-papiers de Rennes, avons appris par voie de presse qu’une plainte avait été déposée contre nous par le Ministère de l’Intérieur suite à la diffusion de 3 tracts et de 2 affiches. Ces écrits accompagnaient deux rassemblements organisés le 02 avril 2008 pour dénoncer l’existence et les pratiques de la Police aux Frontières (PAF), service particulier de la police chargé de lutter contre l’immigration dite irrégulière (voir encadré *). Fin juillet, le Procureur de la République a donné suite à cette plainte, en engageant des poursuites sur la base de la loi du 29 juillet 1881 relative à la liberté de la presse, contre trois membres de notre collectif : choisis arbitrairement. Plus d’une dizaine d’arguments et d’expressions ont été extraits des textes incriminés pour les accuser de « diffamation et injures publiques contre un corps constitué de l’Etat ». Ces écrits sont à disposition de quiconque souhaite se faire une idée.
Lors d’une première audience devant le Tribunal correctionnel de Rennes le 19 septembre 2008, la défense a obtenu un report au vendredi 12 décembre 2008. Le collectif sera défendu par mélanie Leverger, avocate au barreau de Rennes, spécialiste en droit des étrangers ; Muriel Brouquet-Canale, du cabinet Leclerc, avocate au barreau de Paris, spécialiste du droit de la presse ; Stéphane Maugendre, avocat au barreau de Seine-Saint-Denis, président du GISTI (Groupe d’information et de soutien des immigrés). Nous présenterons au tribunal une demande de comparution volontaire par laquelle plus d’une vingtaine de personnes demanderont à être jugées elles-aussi, et ce afin de réaffirmer le caractère résolument collectif de notre fonctionnement.
Un contexte politique : une répression qui s’intensifie
Ce procès prend place dans un contexte politique précis : alliant pressions, mise en cause des associations et poursuites judiciaires : destiné à faire taire les critiques contre la politique d’immigration du gouvernement français : attaques répétées contre le Réseau Education Sans Frontières ; plainte à l’encontre de SOS soutien aux sans-papiers suite aux tentatives de révolte des personnes retenues dans les centres de rétention administrative (CRA), et dans le cadre de cette même affaire, audition d’une militante du Collectif de soutien aux sans-papiers d’Indre-et-Loire durant quatre heures le 25 septembre dernier ; condamnation en première instance d’un syndicaliste de Mulhouse pour avoir dressé un parallèle entre les pratiques gouvernementales et l’Etat vichyste ; remise en cause de la présence et du rôle de la Cimade dans les CRA
Depuis le début, le fond et la forme de la procédure qui vise le collectif ont provoqué de vives réactions émanant à la fois du milieu associatif et syndical, de partis politiques, de collectifs, d’élus et d’avocats. Un rassemblement le 28 juin et une manifestation le 13 septembre ont réuni plusieurs centaines de personnes, pour soutenir le collectif et défendre la liberté d’expression et d’opinion contre la politique française de l’immigration.
Nous appelons tou-te-s celles et ceux qui estiment qu’au-delà de la mise en cause du collectif,
c’est une certaine forme de liberté d’expression et d’opinion qui se joue, à un
RASSEMBLEMENT DE SOUTIEN VENDREDI 12 DECEMBRE 2008 A PARTIR 13 HEURES DEVANT LA CITE JUDICIAIRE DE RENNES 7 rue Pierre Abélard (près du Boulevard de la Tour d'Auvergne)
* « dénoncer l’existence et les pratiques de la PAF »
Depuis sa naissance en 2002, le collectif a souvent été sollicité par des personnes étrangères dénonçant les pratiques de la PAF : modes d’arrestations d’étranger-e-s à domicile, interpellations devant les écoles des parents sans-papiers, menottage systématique des étranger-e-s interpellé-e-s, arrestations d’étranger-e-s aux guichets des préfectures ou devant les locaux associatifs, irruption de policiers dans les procédures de mariages mixtes Plus récemment et de manière croissante, le collectif de soutien aux personnes sans-papiers de Rennes a été sollicité par des personnes étrangères, de nationalités diverses, se déclarant victimes de contrôles d’identité fondés sur la couleur de peau ou sur la langue utilisée, en particulier dans les gares ou le métro. Les tracts et les affiches visés par la plainte dénonçaient à nouveau ces pratiques, comme le font des centaines d’organisations et de collectifs sur tout le territoire français.
Signature du communiqué : Collectif de soutien aux personnes sans-papiers de Rennes, 7 quai Chateaubriand à Rennes
Compte-rendu d’audience : http://www.liberennes.fr/libe/2008/12/sans-papiers.html
Note du 13 janvier 2009 : relaxés ! http://www.plumedepresse.com/spip.php?article1053
Ecrit le 21 janvier 2009
Relaxés
Trois membres du collectif de soutien aux sans-papiers, de Rennes, ont été traînés en justice pour des tracts jugés diffamatoires. La PAF (police aux frontières), s’était offusquée du ton ironique utilisé à propos de ses méthodes. Un tract, en particulier, énumérait les multiples « satisfactions » du métier : « cueillir quelques sans-papiers à leur domicile » , « organiser des contrôles d’identité au faciès » , « menotter les sans-papiers à chaque fois que tu les déplaces » , un métier qui en outre, « si tu aimes les enfants » , autorise leur « enfermement » , sans compter la possibilité de « calmer par une petite piqûre » un « sans-papier trop bruyant » , etc.
Certaines expressions comme « la PAF aime les blagues racistes » ou « la PAF est le bras armé de la xénophobie d’Etat » ont été plus expressément visées par la plainte.
Devant le tribunal, Ginette Janin, enseignante en retraite, s’étonne : « c’est la politique d’immigration du gouvernement qui était visée. Nous pensions qu’en démocratie on avait le droit de critiquer le gouvernement sans être poursuivi. Des hommes politiques, des journalistes ont dit la même chose que nous, pourquoi ne sont-ils pas poursuivis ? chercherait-on à faire taire le mouvement de soutien aux sans-papiers ? Tout ce que l’on dit ce sont des choses qui existent » .
Le tribunal de Rennes a relaxé les accusés. Le Parquet a fait appel.