Ecrit le 14 octobre 2015
On parle de jeunesse dorée pour désigner une jeunesse riche et insouciante. Mais à l’hiver la vieillesse peut être aussi dorée à l’ombre du Tulipier planté dans l’espace vert entourant la maison de retraite ’’Mapa’’ de Châteaubriant. Cet arbre a donné son nom à une maison, dans la rue Duguesclin, pouvant accueillir 10-12 personnes par jour. Mme Claire Bourdaud explique : « nous accueillons des personnes ayant des troubles cognitifs modérés, ou même importants : Alzheimer et autres troubles liés à l’âge voire à un trop grand isolement ». Souvent, ces personnes ont plus de 60 ans, mais il y en a de plus jeunes.
On entre au Tulipier à la demande des familles, ou sur la suggestion d’organismes spécialisés (Clic , ESA, CMP, etc). Les personnes sont encore bien valides, physiquement, mais elles perdent progressivement la mémoire, même la mémoire des gestes (s’habiller, manger, marcher) au point de nécessiter une présence permanente. Quand il y a un « aidant » celui-ci a besoin de répit. Quand il n’y a pas de famille, la personne est en plus grande difficulté. Toujours le Tulipier est une bonne solution.
« Les personnes accueillies n’ont nullement l’impression de venir dans un hôpital » dit Claire Bourdaud. Le personnel, ici, n’est pas en blouse blanche. Les personnes viennent pour la journée (quelquefois une demi-journée) et rentrent chez elles le soir. « Les familles les amènent, ou bien nous allons les chercher à domicile, il y a même un voisin, Marcel, qui vient à pied. Ici il n’y a pas de journée-type, on s’adapte aux personnes. L’accueil se fait toujours autour d’un café, occasion de papoter, de tisser du lien social, de se trouver à l’aise avec les autres » dit Jean-Pierre Rault (Assistant Soins gérontologique).
Desserts, jardin, pêche ...
Et la journée passe vite, en multipliant les activités, selon les goûts de chacun. Les femmes préfèrent la cuisine (surtout les desserts), les hommes aiment bien travailler au jardin. « Nous avons fait un potager, nous avons dégusté nos tomates et fait de la confiture de tomates vertes. La salade ’’pain de sucre’’ est délicieuse » dit Henri. Ratisser les feuilles mortes, tailler les arbustes, ce n’est pas aux services techniques de l’hôpital de le faire : les personnes accueillies retrouvent avec plaisir les travaux et les outils d’antan. En fin de matinée tout le monde aide à la cuisine avant de déjeuner ensemble.
Jeux de mémoire, puzzle 3D, peinture, panneau de résultats de football, écriture du menu, relevé du pluviomètre ...
Et puis il y a les sorties Dans le petit car, deux encadrants amènent quatre personnes, là où elles veulent, au bord d’un étang, dans un espace vert, au marché ou à la Foire de Béré. D’autres personnes vont à la pêche (et les photos montrent qu’elles ont attrapé de beaux brochets). « Nous nous adaptons aux désirs des personnes, avec un souci : faire plaisir » dit Mme Bourdaud, expliquant que quelques personnes se contentent d’être spectatrices, « mais pourquoi pas ? On s’occupe d’elles. Si elles le désirent, elles peuvent s’isoler en salle de repos avec de la musique ».
L’animation est masculine : Jean-Pierre Rault assisté de Jacques Perrier et Romain Barracand (et de jeunes stagiaires). « Nous pensions faire un binôme homme-femme, mais finalement nos soignants passent très bien, ils ont de l’autorité auprès des hommes, et les femmes sont sous le charme ! ». Des bénévoles du Lions’Club viennent régulièrement apporter une aide bien-venue. Il faut rappeler en effet que cet accueil de jour a été imaginé et largement financé par le Lions’Club du Pays de Châteaubriant, il est géré maintenant par le Centre Hospitalier sous la direction de Mme Samson.
La maison de la rue Duguesclin est claire, vaste, entourée d’un cheminement tout autour et d’un espace jardin appréciable où, l’été, les personnes se retrouvent à l’ombre autour d’un barbecue. Un poulailler pourrait être fabriqué prochainement et une activité ’’peinture murale’’ est imaginée.
« Les personnes sont heureuses de venir ici, un jour, deux, trois jours, certaines viendraient même plus souvent. Ces rendez-vous rythment leurs semaines, leur redonnent des repères. Pendant ce temps les aidants naturels soufflent un peu, libérés pour un temps de leur vigilance permanente. Au Tulipier, on respire la sérénité et, le soir, lors du retour à la maison, tout se passe bien. Certaines personnes nous disent qu’elles dorment mieux ».
Le tarif est de 33 €/jour (repas compris) et 4 € de plus quand il y a nécessité d’aller chercher à domicile. En fonction de leurs revenus, les familles peuvent avoir de l’aide, et ça ne coûte rien de venir se renseigner, ou même de passer quelques journées à l’essai. Il reste encore des places au Tulipier pour une vieillesse dorée.
Contact : Claire Bourdaud -
07 61 71 26 41, ou
claire.bourdaud@ch-chateaubriant.fr
Courrier des lecteurs :
" Il faut rendre hommage à l’action du Lions’club qui, outre qu’il supplée à la carence de l’Etat et des collectivités, permet d’offrir des tarifs très attractifs...
En revanche, l’absence du service public sur ce thème comme bien d’autres dans le domaine social est indigne : on a l’impression de revenir aux bonnes œuvres des siècles passés, laissées à la discrétion des donateurs ".
Du côté des familles
Une femme, dont le mari est au Tulipier, témoigne : « Je suis surtout contente pour lui. Chez nous, il se tourne les pouces et ne veut pas participer à des jeux de mémoire quand je le sollicite. Mais il est très content d’aller au Tulipier deux fois par semaine. De plus, une personne du service Alzheimer de Bonnœuvre est venue le solliciter et il a accepté d’aller jouer aux boules tous les lundis, ce que, moi, je n’avais pas obtenu. Pour moi, quand il est là -bas, c’est un peu de liberté, mais un peu seulement car je ne peux pas partir avant lui le matin, et je suis rentrée avant lui en soirée, vers 17h. J’aimais bien aller faire un tour à Nantes, je prenais le car Lila qui me déposait dans le centre. Maintenant le tram-train est quatre fois plus cher, il me dépose à la gare de Nantes, il faut encore payer le tramway pour aller dans le centre, et les horaires ne me permettent pas d’être revenue à temps pour lui. De plus, je ne conduis pas, et la gare de Châteaubriant c’est loin pour moi... ».
Journée des aidants
85% des aidants familiaux se disent, à un moment ou à un autre, touchés par le découragement. Par ailleurs, un tiers des aidants naturels disent n’avoir jamais eu recours à un aidant professionnel. A l’occasion de la Journée Nationale des Aidants (6 octobre), le député Yves Daniel a, dans une question écrite, souhaité une meilleure connaissance de l’impact économique des aidants familiaux des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer . « En effet, une évaluation du coût de l’aide informelle est indispensable, afin d’actualiser les données existantes et permettre ainsi que les mesures prises en faveur des aidants et des malades répondent au plus près à leurs besoins réels ».
La reconnaissance des aidants est un axe fort de la politique gouvernementale, comme en témoignent l’instauration d’un ’’droit au répit’’ dans la loi d’adaptation de la société au vieillissement et les dispositions contenues dans le " Plan National Maladies Neurodégénératives 2014-2019 néanmoins, beaucoup reste encore à faire
(fin du communiqué d’Yves Daniel)