Ecrit le 24 avril 2019
La justice affirme une 3e fois que Paul François est victime de Monsanto
Après douze années de procédure, l’agriculteur Paul François vient pour la troisième fois d’être reconnu victime d’un herbicide de Monsanto. « On a voulu me faire passer pour fou, ça n’a pas fonctionné », a- t-il confié au rendu de la dernière décision de la Cour d’appel de Lyon le 11 avril 2019. Pourtant, pour être indemnisé de la maladie apparue en 2004, il va devoir continuer ses procédures.
« Je pense que les gens n’ont pas conscience du harcèlement que nous avons vécu pendant douze ans », a confié l’agriculteur Paul François le 11 avril 2019 au prononcé de la nouvelle décision de la Cour d’appel de Lyon confirmant la responsabilité de Monsanto dans la maladie dont il est atteint. « On a gagné mais à quel prix, c’est de la folie . Il y aura des séquelles quoi qu’il en soit », a-t-il ajouté. « On a voulu me faire passer pour fou, ça n’a pas fonctionné. Heureusement. Mais je pense qu’il y a des victimes pour qui ça a fonctionné et qu’on a fait passer pour des simulateurs ou je ne sais quoi. J’ai une pensée pour eux. »
Les ennuis de Paul François ont commencé en avril 2004, il y presque quinze ans, après avoir inhalé les vapeurs d’un herbicide de Monsanto, le Lasso, alors qu’il s’apprêtait à traiter ses champs. S’en suivirent des comas à répétition, des maux de têtes violents, des pertes de connaissance, des mois d’hospitalisation... sans que les médecins ne parviennent à faire le lien entre ses problèmes de santé et son intoxication.
Le lien a pu être établi grâce au soutien et au courage de son épouse, de ses proches et de scientifiques. Aujourd’hui, il souffre toujours de graves troubles neurologiques (maux de tête, pertes de connaissance, hospitalisation...) qui l’empêchent parfois de se lever, de travailler et de vivre normalement.
Monsanto peut encore jouer la montre
En 2007, l’agriculteur demande une reconnaissance professionnelle de sa maladie et porte plainte contre Monsanto pour « défaut d’information sur l’étiquette et non-respect du devoir de vigilance ». Les procès s’enchaînent alors : d’abord au Tribunal de grande instance de Lyon en 2012 puis à la Cour d’appel de Lyon en 2015 qui tous deux lui donnent raison. L’affaire va en Cour de cassation, celle-ci casse l’arrêt de la Cour d’appel en juillet 2017 pour un motif de procédure. La Cour d’appel doit de nouveau statuer. Son nouvel arrêt tombe le 11 avril 2019 : « la SAS Monsanto est responsable du dommage causé à M. François à la suite de l’accident du 27 avril 2004 ». Sur le plan financier, la firme est condamnée à verser 50 000 € à l’avocat de Paul François, rien de plus. L’agriculteur est soulagé mais terriblement éprouvé d’autant que son épouse, qui l’a toujours soutenu, est décédée quelques mois plus tôt. Et la procédure ne va pas s’arrêter là . D’abord, Monsanto peut former un pourvoi à nouveau contre cette décision. Ensuite, il devra retourner devant le TGI de Lyon pour une demande d’indemnisation.
« En refusant de conclure sur la question de l’indemnisation, Monsanto a contraint la Cour d’appel à renvoyer cette question devant le Tribunal de grande instance de Lyon, retardant d’autant l’indemnisation », explique l’association Phyto-Victime. Selon elle Monsanto joue la montre en utilisant tous les recours possibles. Aux Etats-Unis, Monsanto a fait également appel dans le procès perdu contre le jardinier Dewayne Johnson atteint d’un cancer en phase terminale après avoir utilisé de grosses quantités de Roundup dans le cadre de son travail.
Paul François souhaite que l’indemnisation soit décidée au plus vite. Pour le soutenir dans son combat, il a lancé un appel à financement participatif sur le site www.okpal.com/fairecondamnermonsanto et a déjà recueilli des centaines de milliers de dons. Phyto-Victimes invite ceux qui le souhaitent à l’aider encore dans sa procédure.
(article de Anne-Françoise Roger)
Pesticides dans l’eau
Glyphosate, atrazine, chlordécone des résidus d’herbicides et d’insecticides particulièrement néfastes pour la santé sont omniprésents dans les eaux de surface en France, révèle une étude inédite publiée mardi 16 avril par générations futures, association en pointe dans le combat contre les pesticides, le rapport montre qu’en moyenne plus de 41 substances actives de pesticides ou de métabolites supposés perturbateurs endocriniens (PE) sont présents dans les cours d’eau (cela va de 50 en Loire-Atlantique à 90 dans le Calvados),
Ce cocktail de molécules menace directement la faune aquatique et les écosystèmes, contribue à l’érosion de la biodiversité et n’est pas sans conséquence sur notre santé, alerte le rapport.
Dans le trio de tête des molécules les plus présentes figure sans surprise le glyphosate, le célèbre désherbant de Monsanto. On en retrouve dans 37 départements. Deux autres herbicides, l’atrazine-déséthyl (un métabolite de l’atrazine quantifié dans 30 départements) et le métolachlore (15 départements), complètent le trio de tête. Preuve de leur persistance dans l’environnement, car ils sont interdits depuis 2003,
Le rapport montre que la chimie agricole menace la biodiversité aquatique. Ces résultats sont à interpréter comme l’indicateur d’une contamination importante de l’environnement dans lequel vivent les humains. Pour ces raisons ils doivent pousser les responsables à mettre en œuvre d’urgence une stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens qui vise réellement à leur interdiction totale.
Concernant les impacts sur la faune aquatique, de nombreuses études montrent des effets de perturbation endocrinienne liés à l’exposition à des perturbateurs endocriniens. Une des plus connues d’entre elles montre par exemple les effets de doses environnementales faibles de l’herbicide ’atrazine’ sur le développement de grenouilles, dont les mâles se féminisent ou peuvent devenir hermaphrodites.
Le Semnon, la Chère, le Don
Sans qu’on sache exactement les concentrations en nitrates et pesticides dans les eaux de notre région, voici une carte publiée par le Syndicat de la Chère.
Le Semnon, la Chère, l’aron et une partie du Don sont en qualité « moyenne élevée » c’est à dire proches du médiocre. La Brutz, le Cône et le Sauzignac sont en « moyenne faible » donc proches du bon. Le Don est dans la rouge à partir de Moisdon jusqu’Ã la Vilaine dont les eaux sont, aussi, de qualité médiocre.
Plus de transparence ?
L’initiative citoyenne européenne « Stop glyphosate », lancée début 2017 par plusieurs ONG, commence à produire ses premiers effets. Les eurodéputés : réunis pour une dernière fois à Strasbourg avant les élections européennes du 26 mai : ont approuvé de nouvelles règles destinées à mieux encadrer la procédure d’évaluation des risques pour les substances entrant dans la chaîne alimentaire, tels que les pesticides ou les OGM.
Cette réforme, si elle ne concerne pas uniquement les pesticides, est directement liée à la mobilisation citoyenne autour du glyphosate. Cet herbicide présent dans le Roundup de Monsanto avait reçu, non sans mal, le renouvellement temporaire de son autorisation de mise sur le marché jusqu’Ã 2022. Pour prendre leur décision, les Etats membres s’étaient servis d’une évaluation positive réalisée par l’agence européenne de sécurité des aliments (EFSA), évaluation très critiquée par le fait que les arguments de l’industrie s’étaient retrouvés quasiment tels quels dans le rapport de l’EFSA. La nouvelle procédure permettra aux scientifiques et aux chercheurs qui le souhaitent, de vérifier les évaluations fournies par l’industrie.