(écrit le 4 décembre 2001)
Pas de manif’ pour les femmes
Le ministre de l’Intérieur de l’Alliance du Nord, qui contrôle Kaboul, en Afghanistan, a interdit mardi 27 novembre 2001 une manifestation féministe dans la capitale afghane, a indiqué son organisatrice, Soraya Parlika.
« Ils ont dit que c’était pour des motifs de sécurité mais c’est juste un prétexte (...) Ils ne veulent pas que la condition des femmes s’améliore », a-t-elle déclaré.
Soraya Parlika a ajouté que le ministre de l’Intérieur de l’Alliance, Younis Qanooni en personne, l’avait appelée deux jours plus tôt, avant de partir pour la conférence sur l’avenir de l’Afghanistan à Bonn, pour lui dire que la marche ne pourrait avoir lieu. « Il a dit que nous devrions attendre une durée indéterminée », a-t-elle poursuivi.
Alors que des femmes avaient commencé à se rassembler mardi matin en bas de son domicile, Mme Parlika a reçu un nouvel appel téléphonique d’un responsable du ministère, interdisant la marche. Celle-ci a été interdite deux fois en une semaine. Une cinquantaine de femmes de la jeune Union des femmes d’Afghanistan se trouvaient mardi dans son appartement, beaucoup portant un simple voile.
Les talibans avaient imposé le port de la burqa, une robe recouvrant la femme afghane de la tête aux pieds, avec un grillage en tissu au niveau des yeux. Deux semaines après la fuite des miliciens islamistes, la quasi-totalité des habitantes de Kaboul continuent à porter la burqa. « Ils (l’Alliance) ont annoncé que les femmes sont libres, mais jeter nos voiles n’est pas la liberté. Ce n’est pas la liberté que nous souhaitons », a déclaré Nafeesa, 17 ans. Selon elle, la situation des femmes actuellement à Kaboul « n’est pas bonne ». « Ce n’est pas ce que nous souhaitions », a-t-elle indiqué.
En Occident, on n’a pas la burqa mais ...
Don Cesare Lodeserto, prêtre italien, qu’on appelle « le prêtre au gilet pare-balle » (et qui est fondateur d’un centre d’accueil pour femmes prostituées à Lecce, sud de l’Italie) a été invité à Paris, mardi 27 novembre 2001, par le père Patrick Giros pour lancer une campagne contre la situation « intolérable » des femmes immigrées victimes de réseaux de prostitution.
« La prostitution est un phénomène invisible que les gouvernements essayent de rendre encore plus invisible pour préserver leur image », dit-il, tandis que Patrcik Giros, note que le gouvernement français a commencé à prendre en compte le problème, par une mesure législative contre les clients de mineurs, mais de façon « totalement insuffisante ».
Sortir de la prostitution
Les deux responsables souhaitent coordonner les actions des associations en Europe, et demandent aux gouvernements d’adopter des mesures qui protègent les femmes qui décident de sortir de la prostitution. « Aujourd’hui, en France, on n’a rien à leur proposer, on est les mains vides », dit le prêtre français.
En Italie, une loi votée en 1998 accorde une aide sociale, sanitaire, une formation professionnelle et une carte de séjour aux femmes qui décident de quitter la rue et les protège lorsqu’elles acceptent de dénoncer les réseaux.
Cette protection n’est pas un luxe : « Il s’agit d’une véritable guerre », affirme le prêtre, « il y a dix jours, un réseau albanais avait compris qu’une fille avait décidé d’entrer dans un programme de protection, un membre de la fondation l’a retrouvée empalée... une autre fille de 16 ans a eu les jambes brisées mais elle a mis 16 hommes en prison. De toute façon, celles qui restent sont soumises chaque jour à des violences physiques ».
En France, affirme Patrick Giros, « les femmes qui sortent des réseaux se comptent sur les doigts d’une main ».
Un marché aux Fermmes
En Angleterre ou en Allemagne, selon lui, les femmes qui collaborent avec la justice sont malgré tout expulsées, alors que le retour est souvent problématique. Ce sont parfois en effet les familles elles-mêmes qui, poussées par une misère extrême, vendent les filles et quand celles-ci quittent le réseau, elles quittent aussi leur famille.
« J’ai assisté à un marché aux femmes en Moldavie, témoigne Don Cesare, une jeune fille est vendue entre 150 et 200 dollars (160 à 210 euros environ), pour être revendue en Albanie 5.000 dollars (5.300 euros), la même fille peut être vendue six ou sept fois », au cours des trajets de pays en pays.
Vente d’organes de bébés
Dans ce combat contre les réseaux criminels de traite des femmes, les associations ont une arme, dit Don Cesare, l’information : « on a pu démanteler un réseau qui projetait d’utiliser les femmes enceintes, car celles-ci ont droit au séjour. Les enfants à naître devaient aller soit au marché de vente d’organes, soit à la prostitution enfantine. En rendant seulement public l’existence de ce réseau, cela l’a mis à terre ».
Mais aucun programme d’action ne peut aboutir s’il n’est pas soutenu par les gouvernements, regrettent les deux responsables.
Femmes battues : pages 1575-1577-1578 etc