Sur la place d’un village
Un homme et une femme dans une rencontre totalement improbable, sur la place d’un petit village de montagne, la nuit. Le thème est celui de la vie, ou plutôt « des vies » vécues ou non vécues. Le 4 février avec le théâtre Messidor
Au départ de toute écriture, il y a le choc, l’appel, l’instant de conscience qui arrête le temps, qui pose étonnamment dans son entièreté le projet, comme un nécessité, presqu’une urgence à dire. Ce déclic va venir de la narration d’un épisode du voyage de Baptiste, jeune globe trotter perdu au Mexique sur une petite place publique. Un rendez-vous manqué avec un hôte de « coach surfing » remplacé par la rencontre insolite autant qu’étrange d’une femme noctambule, sortie de nulle part et dont le comportement et les propos quelque peu « schizophrènes » ouvriront les champs à mille possibles, à mille interprétations, à mille imaginaires, l’espace de quelques heures partagées
Ce dialogue de deux égarés de la nuit est conçu comme une joute, une sorte de combat de self-défense où chaque mot, chaque dialogue percute et oblige le partenaire au repli et à la recherche d’un nouvel équilibre . Une bande son très riche, accompagne presque en permanence les mondes intérieurs des deux personnages. Les silences ont valeur de jeu à part entière, repli sur soi, retours intérieurs pour accuser les coups, pour reprendre haleine.
Mercredi 4 février, à l’espace Capellia à La Chapelle sur Erdre - création du théâtre Messidor - Réservations 02 40 72 97 58
départ en co-voiturage 18h45 à Châteaubriant au théâtre de Verre.
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Le spectacle sera donné à Châteaubriant le 8 octobre 2015 - 02 40 81 19 99
Le 8 octobre 2015
La nuit est noire. Sur la place du village il n’y a qu’un banc et un arbre rabougri, sous un vieux réverbère. Mais que vient faire cette femme, en robe de mariée, seule, comme rejetée. En fuite. Pour fuir quoi ? L’époux, les invités ? Une noce vraiment ? Ou un rêve de noce ? Soudain surgit un homme, maquillé, il a le nez rouge, il a été jeté, lui aussi, sur cette place, on ne sait par qui.
Ces deux êtres se rencontrent, sans se rencontrer. Ils se racontent sans vraiment se trouver, les paroles de l’un, de l’une, font écho aux propos de l’autre. L’une, Blanca, ne sait pas trop quelle fut sa vie, quel sera son destin, elle est la femme des nuits blanches, ballottée par les tempêtes de la vie. Ulys est comédien, amuseur public, meneur de revues, saltimbanque, son paradoxe est de prétendre ne vivre qu’une vie, quand il passe son temps à jouer la vie des autres.
Une bande son très riche, accompagne presque en permanence les mondes intérieurs des deux personnages. De petites musiques s’immiscent à chaque instant dans le jeu, emportant tour à tour chacun des protagonistes dans leurs mondes secrets et parlant pour eux. Parfois, les personnages sont à l’unisson et perçoivent ensemble les mêmes mélodies, mais jamais, comme dans la vie réelle, cette harmonie ne dure très longtemps... Jusqu’au chant du coq dans le lointain, jusqu’au départ de Blanca, jusqu’Ã l’arrivée d’un camion poussif qui éteint définitivement la nuit et boucle l’histoire. (Création théâtre Messidor)
Blanca - (Elle arrange tendrement les vêtements de la poupée).
Vous avez remarqué ?
Ulys - Quoi ?
Blanca - La nuit ! On perçoit plus de sons la nuit que le jour ! Nos sens sont plus éveillés la nuit !
Ulys - « La nuit noire qui suspend les fonctions de l’Å“il, rend l’oreille plus prompte à percevoir ». ... C’est beau hein ? ... Hermia dans « le songe d’une nuit d’été ».
Blanca - (Elle poursuit sa pensée) La nuit, on redevient animal, on sent, on renifle l’instinct ! Le plaisir vous savez ! Manger, boire, faire l’amour, dominer, se soumettre et avoir peur de la mort.
Ulys - (A son tour il prolonge son idée) Tout ça pour une histoire d’enfant volé !
Blanca - (Très vive) Qu’est-ce que vous dites ?
Ulys - C’est le sujet de la pièce de Shakespeare. La querelle entre le roi Obéron et la reine Titania. Ils se disputent la garde d’un enfant volé.
Blanca - Taisez-vous !
Ulys - (Prenant plaisir à enfoncer le clou) C’est la fable ! L’argument principal ! Un enfant bien-aimé, volé à un roi de l’Inde et chacun le veut pour page.
Blanca - (Après une respiration) Est-ce qu’une vie se construit sur des vides, sur des absences, sur des manques ?
Ulys - Je ne sais pas, mais c’est par le manque qu’on dit des choses ! Par le manque d’amour qu’on dit l’amour, par le manque de désir qu’on dit le désir, par le manque d’être qu’on dit l’être. (Il boit de nouveau)
Blanca - C’est par le manque de vie qu’on dit la vie !
Ulys - (Après quelques secondes de réflexion) La vie est d’une absurdité totale, mais il faut quand même la vivre ! (Il montre la poupée). Elle s’appelle comment ?
Blanca - Je sais plus ! (Temps) Comment voulez-vous qu’elle s’appelle ?
Ulys - Blanca ! Comme vous !
Blanca - (Surprise) Blanca ?
Ulys - Oui ! Ça vous va bien Blanca ! La femme blanche ! La femme des nuits blanches ! Le pélican blanc, c’est bien vous !
Blanca - Non ! Je ne lui aurais pas donné ce nom là .
8 octobre au théâtre de Verre - Réservations 02 40 81 19 99
Ecrit le 7 octobre 2015
La marée était trop forte
Blanca - Faites quelque chose ! Je vous en supplie ! Ils me cherchent ! Ils vont me reprendre !
Ulys - Attendez ! (Il attrape le rouge à lèvres posé sur le banc et badi-geonne le nez et les pommettes de Blanca. Ulys enchaîne une entrée clownesque. Il joue le clown blanc)
Oh, Madame Blanca, pourquoâ vous avez laissé l’océan inonder vos yeux ?
Blanca - (Hésitante) Parce que...
Ulys - Parce que la marée était trop forte, Madame Blanca ! Elle est passée par dessus le quai !
Blanca - Parce que...
Ulys - Parce que plouf ! A trop vous pencher, vous êtes tombée de l’autre côté de l’horizon, Madame Blanca !
Blanca - Parce que...
Ulys - Parce que vous êtes une sirène ! Reine des « Si » ! Divinité des flots ! Votre chant en si, en mi, en do, endommage les rêves, en ré, en la, enlace les marins...
Blanca - Parce que... Parce que
Ulys - Parce que,
Blanca - (Assez agacée) Parce que mes yeux ne sont pas des yeux Môssieur...mais deux étoiles de mer ! Je roule dans mes larmes comme les vagues sous la caresse du pélican Môssieur !
Ulys - Parce que
Blanca - Parce qu’un grain de sel s’est noyé dans une goutte d’eau... ! Et ça pique Môssieur ! Ça pique les yeux et le cœur !
C’est une création du théâtre Messidor, donnée le jeudi 8 octobre au théâtre de Verre - Réservations 02 40 81 19 99
Regardez un extrait du spectacle Une Nuit de Petites Musiques